HÔPITAL 2007 : débattre pour résisiter

Le 20 octobre 2005, le collectif des praticiens hospitaliers, la CGT, Attac, la LDH, les associations d’usagers d’Isère, de Savoie et de Haute-Savoie se sont rencontrés au CHS de Bassens pour débattre et réfléchir aux moyens d’actions contre l’attaque du service public hospitalier.

Voici
– le texte présenté par Claire Gekiere en introduction au débat pour l’USP ; J. Piggio pour la CGT-santé 73 et J.-C. Bernard pour Attac sont aussi intervenus ;
– quelques propositions à l’issue du débat.

I- Introduction de Claire Gekiere, psychiatre de secteur, Union Syndicale de la Psychiatrie (USP)

a) Pourquoi cette invitation ce soir ?

• Le service public hospitalier est en plein démantèlement, parmi d’autres services publics.

Trois points forts :
– les soins sont un produit de consommation comme un autre ;
– les établissements de santé deviennent des entreprises concurrentes ;
– les ARH (agences régionales d’hospitalisation) sont des instruments de pouvoir de type féodal.

• Il nous paraît urgent de défendre le service public hospitalier, et nous pensons que cela ne concerne pas que les professionnels de la santé.

• Nous pensons qu’en débattre en confrontant les points de vue, les attentes et les moyens d’action de toutes les organisations invitées est une façon possible de faire émerger de nouvelles voies pour résister et agir.
Par exemple : comment créer un rapport de force adéquat avec la nouvelle répartition des pouvoirs (puissance régionale) ? D’où notre invitation à l’échelon loco-régional.

b) Que signifie « Hôpital 2007 » ?

• C’est un rouleau compresseur contre le service public hospitalier.

• C’est :

– Un argumentaire initial appelant à la « réforme », et l’on ne peut pas être contre la réforme, le mouvement, les changements et pour les pesanteurs, les anachronismes, l’immobilisme ! Un objet flou, « moderne » dans son vocabulaire, multiple sous ses déguisements.
– Des textes qui tombent sans concertation, de façon non démocratique, sous forme d’ordonnances puis de décrets d’application.
Dès septembre 2003, une première ordonnance, dite de « simplification administrative » prépare le terrain en supprimant les mécanismes de la planification des soins. La dernière en date, du 2 mai 2005, institue le volet « gouvernance » d’Hôpital 2007.
– Une philosophie libérale, celle de l’OMC (Organisation mondiale du commerce), où l’offre de soins doit être soumise à la libre concurrence. Le soin est un produit de consommation comme un autre. Dans les textes de l’AGCS (Accord global sur le commerce des services), les lits d’hôpitaux sont dans le paquet hôtellerie, et le dossier médical dans le paquet informatique.

• Dans les textes qui tombent, il y a trois volets :

– la T2A (tarification à l’activité), janvier 2004. Très schématiquement, un budget hospitalier c’était : un budget prévisionnel -> dotation budgétaire -> dépenses -> réajustement.
C’est devenu : activités -> recettes -> dépenses.
Ce système, où les activités affectées d’un tarif génèrent les recettes qui permettent les dépenses, monte en puissance pour les hôpitaux MCO (médecine, chirurgie, obstétrique) et ne s’applique pas encore pour les SSR (soins de suite et réadaptation) et la psychiatrie (où il n’a pas été possible de faire un lien simple entre l’activité et son coût).
Il devient donc crucial pour les établissement hospitaliers, sous la pression de ce modèle où la production génère des recettes comme dans les entreprises privées, de créer des occasions de recettes (d’autant que tous les budgets sont revus à la baisse d’au moins 10 % par l’ARH cette année).
Un exemple très concret dans un hôpital psychiatrique de la région : multiplier par 2 le prix du ticket modérateur résiduel à la charge du patient hospitalisé en 2005, ce qui réalise un transfert de charge sur les usagers au moment même où la réforme de l’Assurance maladie diminue la couverture individuelle des frais de santé.
– La « nouvelle gouvernance » (2 mai 2005) réforme l’organisation interne de l’hôpital. Elle remplace les services par des pôles d’activité, avec des notions d’efficience (pour ne pas dire productivité) et d’intéressement collectif. Les pouvoirs des directeurs sont renforcés pour un meilleur « management ».
– Le 3e volet, c’est la réforme du statut des personnels, qui doit commencer par les médecins : fin de l’indépendance professionnelle grâce notamment à l’embauche locale (pour le moment les praticiens hospitaliers sont nommés par le ministre de la santé) et à la généralisation des CDD avec des objectifs (d’activité surtout) à remplir.

c) Que faire ? Comment réagir ?

Ces derniers temps, il est plus facile de lister ce qui n’a pas marché :
les grèves et les manifestations contre la réforme des retraites et de la sécurité sociale, les pétitions (par exemple, le ministre a eu plusieurs milliers de signatures de praticiens hospitaliers sur son bureau contre la réforme prévue de leur statut, sans effet notable pour le moment).
Donc, comment ne pas s’user ?
Comment rester solidaires et inventifs, continuer à se penser comme appartenant à des groupes et non comme des individus isolés ?
Comment, pour les professionnels de santé, dans l’exercice quotidien, ne pas se laisser piéger par ce modèle, penser gestion, comptes, efficience et finir par traiter des humains comme des produits marchands ?

Pour conclure, un exemple d’action : en PACA, un collectif pour la défense de la psychiatrie, alliant syndicats et associations (Attac, usagers…), a obtenu de l’ARH le principe d’une journée de débat sur la psychiatrie en PACA.

II- Quelques propositions non exhaustives à l’issue du débat

a) Participer aux Etats Généraux de la Santé organisés au printemps 2006 (date à confirmer) par Attac-Santé 74, avec des réunions préparatoires.

b) Après-midi le 5 novembre sur les services publics à St Jean de Chevelu (avant pays savoyard).

c) Proposition de consacrer à ce thème des présences place St Léger à Chambéry.