CEDRATE – Séminaire Cliniques de la resymbolisation – 19 février 2008

CEDRATE, Centre de recherches et d’actions sur les traumatismes et l’exclusion sociale

Séminaire Cliniques de la resymbolisation

Ce séminaire non payant est ouvert dans la limite des places disponibles.
Il vise à fonder dans l’éthique, la théorie et la pratique clinique
un champ d’interventions d’où l’acte engagé dans la Culture
et dans l’espace des solidarités humaines ne serait pas
tenu en lisière et qui réponde, de ce fait,
à certaines des exigences de notre époque.

La prochaine séance du Séminaire se tiendra le 19 février 2008, de 18 heures 30 à 20 heures 30, toujours dans la salle 215 de la Maison des sciences de l’homme de Paris, 54 Boulevard Raspail.

Cette séance, animée par Bernard et Concepcion Doray sera la reprise, à chaud, du travail qu’ils ont mené au Chiapas (Mexique), dans le cadre de la Commission civile internationale d’observation des droits humains, participation qui s’est terminée le 10 février 2008.

Ce travail a abouti en quelques jours à des résultats d’une ampleur inattendue : la libération de deux personnes (un père et son fils), incarcérés dans une prison de haute sécurité avec des chefs d’inculpation imaginaires et effrayants, après avoir, en réalité, été torturés par un groupe de paramilitaires ; le retournement de la situation par ces hommes « cassés », qui, soutenu par une association de défense des droits humains particulièrement compétente et courageuse, ont alors porté plainte contre leurs tortionnaires ; la promesse du Gouverneur de l’État du Chiapas de faire libérer huit autres personnes incarcérés dans des situations d’injustice analogue.

Un film accompagnera la présentation du contexte : dans Las lagunas de Montebello, l’instrumentalisation des conflits pour la terre, par le pouvoir politico-économique (avec la mise à mal de la loi et du tiers par une politique de division des communauté en donnant pour la même terre un titres de propriété à deux groupes a priori hostiles), la pratique de l’impunité pour les activités criminelles des groupes paramilitaires menées en complicité directe des forces de « l‘ordre », et de l’autre côté,“l’arme de la dignité et de la conscience“, pour les paysans zapatistes ou affiliés, qui refusent l’inhumanité de la confrontation armée.

Ce film présentera ensuite la chronique de l’intervention dont il sera question. Le caractère aléatoire (et même extrêmement chanceux) de cette intervention de la commission par la voie de l’intervention médicale et psychologique, la conversation avec la femme et mère des deux torturés emprisonnés, la négociation pour l’entrée d’une partie de l’équipe dans la prison, d’abord pour un entretien dans le parloir avec le fils, puis dans l’infirmerie avec le père et le fils dont la situation physique et psychologique est soigneusement évaluée, le moment dramatique où ces deux homme acceptent que leur « cas » devienne un cas pour une commission pour la défense des droits humains qui portera ses travaux devant l’ONU et le parlement européen. Puis c’est la remise d’un rapport médical sur la situation des emprisonnés, la reprise de ce communiqué par le journal progressiste du Mexique La jornada, avec le nom du Médecin et de la psychologue, la conférence de presse dans laquelle une partie de la consultation médicale est montrée, la confrontation devant le juge entre les victimes et leurs tortionnaires, et la décision des victimes de porter plainte contre leurs bourreaux, ce qui constitue une démarche exceptionnelle.

Le débat pourra porter sur les propositions suivantes :
– 1) autant pour la manipulation des titres de propriété des terres que pour la question de l’impunité, on est confronté à des situations qui apparaissent d’abord simplement comme des ruses destinées à un but précis, mais leur effet porte beaucoup plus loin que ce but : c’est la culture et la cohérence du corps social qui est directement mise à mal par l’effacement du tiers légitime au profit d’une cohérence carnivore tacite.
– 2) à l’inverse, lorsque l’écart est ainsi devenu considérable entre le légal et le légitime, faire ponctuellement un acte normal et légitime (une consultation médicale pour deux blessés) peut libérer beaucoup d’énergie créatrice qui va jusqu’à bousculer la légalité illégitime. Cet acte communique alors de l’énergie et il suscite d’autres actes légitimes qui instituent, à leur niveau, une cohérence nouvelle.
– 3) pour s’adresser ainsi aux sujets réels de l’histoire réelle, l’intervention resymbolisatrice doit expressément prendre en compte le contexte et l’histoire des femmes et des hommes réels.
– 4) dans certaines conditions, l’émergence de processus nouveaux susceptibles de resymboliser une situation dans le corps social peut susciter des analogies dans la clinique individuelle.
– 5) dans la clinique individuelle, pour créer la possibilité qu’à un moment fécond particulier, une énergie créatrice se libère sous la forme de l’émergence d’un processus nouveau, la phobie de la complexité du réel et l’amour des procédures simples sous prétexte de scientificité, qui est fréquent dans les pratiques médicales, doit être mis entre parenthèses pour dégager la possibilité de pratiques obéissant à des logiques non linéaires, c’est à dire complexes.