Dépêche APM du 10 avril 2008 : Réactions mitigées des intersyndicats de praticiens hospitaliers sur le rapport Larcher

PARIS, 10 avril 2008 (APM) – Le rapport de la commission Larcher sur les missions de l’hôpital a suscité jeudi des réactions mitigées des intersyndicats de praticiens hospitaliers.

La Coordination médicale hospitalière (CMH) indique jeudi dans un communiqué qu' »après le catalogue fourni de propositions » de Gérard Larcher, elle attend désormais l' »ordonnance » de la ministre de la santé qu’elle espère « beaucoup plus précise » et avec des priorités.

« L’économie générale [des] propositions [de Gérard Larcher] n’apparaît pas évidente tant les rondeurs et les prudences sémantiques sont présentes » mais il « s’y dessine un avenir hospitalier concurrentiel entre deux secteurs, l’un public qu’il veut plus rassemblé et moins administré, l’autre privé, auquel il veut assurer une extension des missions et une pérennisation des financements sur le long terme », observe la CMH.

Elle s’inquiète notamment de voir que les cliniques privées répondraient aux appels d’offre concernant les missions de service public alors que, lors de la présentation de son rapport d’étape en janvier, « Gérard Larcher avait stigmatisé le risque que faisait courir pour l’accès aux soins, l’irruption des fonds de pensions suédois ou américains dans le capital des cliniques ».

La CMH déplore notamment la proposition d’étudier l’engagement des grandes institutions financières, telles que la Caisse des dépôts et consignations (CDC), « sous forme de mise en oeuvre d’un fonds d’investissement coté », de la Mutualité ou des groupes d’assurances.

« Un fonds coté en Bourse de quelque origine qu’il soit pourra donc toujours finir dans les mains des fonds de pension américains ou suédois! », met-elle en garde.

Pour la CMH, le système de santé (hôpitaux, libéraux, cliniques) ressemble de plus en plus à un « grand corps malade » et « il y a urgence au changement » pour l’ensemble mais « la réforme par la concurrence, par le marché, est inflationniste et sans garantie sur la qualité ».

« Après les ordonnances de 1945 et de 1958, il est nécessaire pour tous (…) qu’il y ait une ordonnance de 2008, capable du pari de l’efficience, de la qualité en respectant l’indépendance professionnelle, capable d’instaurer, pour cette génération de démographie médicale en berne, un mode nouveau et partagé de rémunération médicale qui réduise la fracture entre exercice médical conventionné et exercice salarié [et] capable de reconnaître à côté de l’acte technique ‘roi’ un acte clinique si indispensable aux malades », conclut la coordination.

A PRENDRE ET A LAISSER POUR L’INPH ET LA CPH

Contactée par l’APM, la présidente de l’Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH), Rachel Bocher, a observé jeudi qu’il s’agissait d’un « rapport de plus » pour mener la « sixième réforme en 20 ans » alors qu’il faudrait déjà évaluer la dernière réforme. Elle demande une nouvelle politique de santé.

Pour elle, le rapport est « fourre-tout », avec beaucoup de propositions « à prendre et à laisser ». Rachel Bocher estime nécessaire de clarifier ces orientations.

Elle s’interroge sur la mise en oeuvre des nombreux « voeux pieux » du rapport, auxquels l’INPH adhère en général, comme la valorisation du statut et le renforcement de l’attractivité de l’hôpital.

S’agissant de la création d’un statut aménagé en plus du statut actuel des praticiens, elle craint que la multiplication des statuts nuise à la cohérence des équipes.

Enfin, elle qualifie d' »un peu étonnante » la proposition de confier la nomination des praticiens aux futures agences régionales de santé (ARS). « Ca dépendra de ce que seront les ARS », a-t-elle ajouté.

Pour la Confédération des praticiens des hôpitaux (CPH), le rapport Larcher rassemble également beaucoup de « voeux pieux », notamment sur le réaménagement ville-hôpital et la permanence des soins car cela doit passer par une négociation avec les libéraux, a indiqué à l’APM son président, Pierre Faraggi.

Il a également indiqué avoir du mal à voir comment vont se décliner les communautés hospitalières de territoire, face à la grande diversité des situations locales.

Pierre Faraggi regrette le « flou » entourant les propositions notamment les partenariats avec le privé.

S’agissant de la gouvernance de l’hôpital, il considère que les propositions correspondent exactement au « contraire de ce qu’il fallait faire » et risquent de s’avérer dissuasives pour les jeunes praticiens.

Alors que la précédente réforme de la gouvernance est « au milieu du gué » et « souvent bloquée car les directions ne veulent pas donner de délégations », modifier encore une fois les instances ne simplifiera rien du tout. « L’hôpital ne va pas si mal mais (…) à force d’acharnement thérapeutique, on va finir par le mettre très mal », a-t-il mis en garde.

Pierre Faraggi a par ailleurs rappelé que son intersyndicat continuera à se battre pour conserver la nomination ministérielle.