Monsieur le Président de la Fédération Hospitalière de France, cher Claude Evin,
Mesdames et Messieurs les Présidents et Délégués Régionaux de la Fédération,
Monsieur le délégué général, cher Gérard Vincent, Mesdames et Messieurs,
Le moment est venu pour nous de réformer l’hôpital pour préserver un système de santé dont les Français sont fiers, à juste titre.
Raisonnablement, personne ne peut remettre en cause les fondements même de notre système. Mais personne ne peut laisser non plus, par défaut de vigilance, se dégrader les soubassements de notre maison commune.
Parce que nous ne voulons pas changer de modèle hospitalier, nous devons changer l’hôpital.
Parce que nous ne pouvons pas faire payer aux générations futures les conséquences de notre inertie, parce que nous ne voulons pas leur laisser une dette impossible à régler, nous devons rénover en profondeur notre organisation sanitaire.
Ma politique de santé, tout en intégrant les contraintes de l’efficience, en raison même du principe de solidarité entre les générations, est d’abord une politique de justice. Elle ne saurait, en aucun cas, procéder d’une vision strictement utilitariste.
Quand l’intérêt général est en jeu, quand il faut défendre les valeurs du service public, quand le temps d’agir ne peut plus être différé, alors le dialogue permet de s’accorder sur les nécessités de la réforme.
J’ai toujours agi dans cet esprit, cherchant à susciter la volonté partagée d’avancer ensemble dans l’intérêt de tous.
Quelques mesures fortes montrent que le progrès est toujours possible quand la responsabilité est au rendez-vous.
Ainsi, un dialogue social exemplaire a permis de régler la question des comptes épargne-temps qui traînait depuis trop longtemps. On le devait aux professionnels de santé, je l’ai fait. De même, l’avenant 27 qui rend opérationnel le dispositif de permanence des soins sur toute la période de fermeture des cabinets médicaux de ville, est le premier avenant de l’histoire de la convention médicale à avoir été signé par l’intégralité des syndicats représentatifs.
Dans le même esprit, le protocole D3S qui modernise le statut des directeurs d’établissement sanitaires et médico-sociaux, a été signé par les trois syndicats représentatifs : SNCH, CH-FO et Syncass-CFDT.
Ainsi, la réforme dans le dialogue n’est pas pour moi un vain slogan : c’est un impératif.
J’ai visité beaucoup d’établissements de santé publics, privés, privés non lucratifs, centres de lutte contre le cancer, j’ai pu constater l’engagement des personnels qui, au jour le jour, le font vivre, et j’ai toujours entendu une seule et même volonté s’exprimer : préserver le pacte de 1945.
Telle sera donc la seule finalité de notre réforme : moderniser l’hôpital pour garantir dans l’avenir, sur tout le territoire, l’accès à des soins de qualité, en sachant susciter la responsabilité de chacun.
Ma politique de santé n’est pas une politique d’annonces. Elle obéit clairement à trois exigences : l’exigence d’égalité, l’exigence de responsabilité individuelle et l’exigence de responsabilité collective, autrement dit de « solidarité ».
L’égalité, doit être assurée concrètement dans l’accès aux soins. Non pas une égalité abstraite, incantatoire, mais une égalité effective qui suppose, d’abord, de considérer chaque patient, non pas comme un malade parmi d’autres, mais comme un être social, saisi dans sa globalité.
C’est dans cette optique que je veux construire la loi Santé, patients, territoires que je porterai à l’automne devant le Parlement, au terme d’une concertation que je souhaite exemplaire.
Etre égaux, ce n’est pas être identiques. Ainsi, nous ne pourrons assurer concrètement et améliorer pour chacun les conditions de l’accès aux soins, qu’en tirant les conséquences nécessaires de la gradation des besoins de santé.
La gradation des besoins appelle une gradation des soins qui appelle elle-même une gradation des structures. L’adaptation de l’offre de soins aux besoins suppose ainsi de redéfinir les conditions d’une plus juste répartition des structures de soins sur le territoire.
On ne fait pas systématiquement appel au même hôpital pour des soins de suite et une prothèse de hanche. Ces différents niveaux appellent des réponses graduées. Chacun doit pouvoir avoir recours au bon niveau de soins, en fonction de ses besoins : des hôpitaux de proximité pour les soins courants, les consultations et les séjours longs, des centres hospitaliers équipés de plateaux techniques performants et dotés d’équipes spécialisées pour les actes invasifs, des CHU pour les pathologies complexes et des centres de référence pour les pathologies rares et les prises en charges très pointues. Une opération chirurgicale planifiée peut donner lieu à un déplacement plus important qu’une urgence. Je ne défendrai donc pas abstraitement le principe d’une égale proximité de toutes les structures.
Ceux qui défendent ainsi cette pseudo-proximité au nom d’un principe d’égalité purement incantatoire, participent au contraire au maintien et au renforcement de l’inégalité réelle.
Doit-on condamner certains de nos concitoyens à des soins de qualité discutable, pour des pathologies parfois graves, au nom de la proximité ? Je ne le crois pas.
En effet, il n’est pas nécessaire d’avoir lu tous les théoriciens de la justice sociale qui, depuis trente ans, dénoncent l’accroissement des inégalités de traitement liées aux différences socio-culturelles, pour comprendre que, dans ces circonstances, ceux qui se trouvent mieux informés de la qualité des services offerts auront toujours plus de chances d’être bien soignés, parce qu’ils sauront éviter de déterminer leurs choix en fonction d’un critère de proximité en l’occurrence inadapté à leurs besoins.
En revanche, dans l’urgence, chacun, quel que soient ses revenus et son niveau d’information, se trouve à égalité.
C’est pourquoi je veux, conformément au principe de justice qui doit déterminer une politique de santé responsable, favoriser l’accès de tous aux services d’urgence répondant à un besoin réel de proximité. Je veux que, d’ici deux ans, 90% de la population puisse être prise en charge en moins de vingt minutes par une structure d’urgence, ce n’est que 80% aujourd’hui. 625 structures hospitalières assurent les urgences, 101 SAMU et 425 SMUR.
Un tel maillage est exceptionnel. Il peut cependant être renforcé, par une implantation plus harmonieuse des SMUR, notamment.
Les SMUR héliportés et les outils de télésanté devront également être intégrés dans les schémas des urgences.
La télésanté permet, en effet, de suivre des malades chroniques, d’établir des diagnostics à distance. Elle permet au professionnel de santé isolé de bénéficier de l’avis des experts de toutes les disciplines. Elle facilite le maintien à domicile des patients, au premier rang desquels les personnes dépendantes.
De même que l’invocation abstraite de l’impératif de proximité est inopérante, de même il est illusoire de penser qu’un établissement puisse tout faire tout seul. En chirurgie, comme dans d’autres disciplines, on ne fait bien que ce que l’on fait souvent et en équipe.
La complémentarité vaut effectivement toujours mieux que l’exhaustivité. Il faut, en ce sens, que les établissements soient complémentaires et développent, chacun, des pôles d’excellence. En aucun cas, il ne faut laisser, comme à l’état de nature, les gros poissons manger les petits. C’est pourquoi je souhaite que les établissements travaillent ensemble pour analyser les besoins et proposer une réponse graduée à la population. Le concept des « communautés hospitalières de territoire » va dans ce sens et je donnerai, comme je l’ai annoncé, priorité aux établissements qui s’inscrivent dans une démarche partenariale pour les accompagnements financiers au titre des aides à la contractualisation ou d’hôpital 2012.
Améliorer les conditions d’accès aux soins, c’est aussi, bien entendu, assurer plus également le principe de leur permanence sur le territoire.
La signature de l’avenant 27 à la convention médicale permet au dispositif de permanence des soins de s’étendre à l’ensemble des horaires de fermeture des cabinets médicaux.
De nombreux départements ont, par ailleurs, fortement réorganisé la permanence des soins en s’appuyant sur les médecins généralistes, bien sûr, mais aussi sur les SAMU- centres 15, des associations de régulation libérale, des maisons médicales de gardes et les établissements de santé. Des solutions pragmatiques partenariales ont pu être trouvées grâce à l’investissement de tous. Les systèmes ambulatoires et hospitaliers sont interdépendants. Leur collaboration est, à cet égard, indispensable. Je vais poursuivre la rénovation de la prise en charge tarifaire de la permanence des soins à l’hôpital, en l’ouvrant plus largement à toute l’hospitalisation, qu’elle soit publique ou privée.
Je sais par ailleurs que de nombreuses spécificités régionales géographiques, démographiques ou historiques rendent l’évolution de la permanence des soins plus difficile dans certains départements, notamment ruraux. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à ce que soit créée une mission d’appui spécifiquement chargée d’accompagner, s’ils sont volontaires , les départements en difficulté dans cette nouvelle étape d’organisation de la permanence des soins. Le dossier progresse jour après jour, pour contribuer à renforcer notre réseau de premiers recours, pour éviter l’engorgement de l’hôpital.
Maintenir la qualité de notre service de santé suppose de garantir à chacun l’accès aux soins. Cet objectif de ma politique de santé est d’abord un impératif de justice !
Les gains d’efficience recherchés par toutes ces réformes ne sont pas une fin en soi. Nous ne poursuivons qu’un seul but : redonner toute sa substance au principe d’égalité, impliquant pour chaque Français la possibilité de bénéficier de soins de qualité.
Je pense aux plus démunis, bien sûr, qui seraient les premières victimes de la dégradation d’un système de santé négligeant d’assurer l’effectivité des principes qui le régissent.
A cet égard, il faut tout faire pour lutter contre la pratique scandaleuse, insupportable, du refus de soins. Mon projet de loi, Santé, patients et territoires, incorpore cette exigence.
Mais je pense aussi à tous ces Français qui, par choix ou par obligation, n’habitent pas au cœur des villes, et qui, dans les zones périurbaines ou rurales, ne sauraient être exposés au risque de la désertification médicale. Je n’ai pas attendu pour demander, dans le cadre de la loi de finances de la sécurité sociale 2008, que les négociations conventionnelles prévoient la mise en œuvre de mesures contribuant à lutter contre les déserts médicaux, qui n’apparaissent pas seulement en zone rurale. Trouver un médecin près de chez soi, cela ne peut pas devenir un privilège.
La santé est un droit qu’il nous revient de garantir par un effort de modernisation sans précédent. Cet effort participe du renouveau voulu par Nicolas Sarkozy et attendu par notre pays. Le désir de réforme est fort. Notre devoir est d’y répondre sans tarder, sans feintes ni faux-fuyants.
Je voudrais à cet égard saisir l’occasion qui m’est ici donnée de dire ma détermination à conduire une politique ambitieuse qui ne se réduise pas à une énième réforme, une réforme sans âme et sans épiderme, technocratique et comptable.
C’est à nos concitoyens que je pense qui savent ce que signifie « ne pas trouver un médecin près de chez soi en cas d’urgence », « s’inquiéter du vieillissement, de l’isolement », et qui ne savent plus à qui s’adresser pour répondre à leur problème de santé, à tous ceux qui se sentent un peu perdus dans les méandres d’un parcours de soins, parfois redondant, souvent peu compréhensible.
La question de la démographie médicale, en ce sens, n’est pas un sujet de spéculation abstraite.
Près de 4 millions de Français éprouvent de réelles difficultés à trouver un médecin, alors même que la densité de médecins par habitant est l’une des plus élevées de l’OCDE. Doit-on laisser, sans rien faire, se perpétuer une telle aberration ?
C’est en ce sens qu’il faut optimiser l’organisation du travail des professionnels de santé pour libérer du temps médical. Cette organisation suppose le développement de collaborations entre professionnels, notamment au sein des maisons de santé dont l’instauration est plébiscitée par ces derniers.
J’entends donc faciliter le déploiement de ces maisons de santé ainsi que toute organisation susceptible de faciliter la collaboration entre professionnels : ainsi je veux favoriser les délégations de tâches, l’institution de modes de rémunération alternatifs au paiement à l’acte, la simplification des conditions de remplacement, mais aussi la télémédecine.
Des mesures plus macroscopiques, comme la modulation du numerus clausus ou une meilleure répartition du nombre des médecins en formations sur le territoire, par spécialités, en fonction des besoins de la population, pourront être prises, afin d’anticiper et d’accompagner les évolutions à venir de la démographie médicale.
Garantir une offre de soins de qualité accessible à tous est notre mission.
Tout service public est soumis à un impératif de qualité. En ce sens, tout établissement concourant à assurer ces missions, qu’il s’agisse d’institutions publiques ou privées, est tenu de satisfaire un certain nombre d’exigences. Ainsi, je souhaite moderniser les contrats de service public de telle sorte que les cliniques privées s’engagent à respecter les impératifs qui s’imposent à tous.
Les cliniques devront ainsi respecter des engagements tarifaires de non dépassement, dès lors qu’elles se trouvent en situation de monopole local. Comment pourrait-on admettre que certains n’aient plus accès à une offre à tarif opposable ? Dans le même esprit, l’activité libérale à l’hôpital sera davantage encadrée. Peut-on admettre qu’un patient doive attendre plus d’un mois pour une intervention à l’hôpital et qu’il lui soit proposé de la faire très rapidement s’il a recours au secteur privé, dans ce même hôpital ?
La qualité n’est pas qu’une abstraction. Elle est aussi, et surtout, l’effet de la pratique quotidienne des personnels médicaux et paramédicaux. La qualité du service rendu dépend d’abord, très concrètement, de l’organisation globale des ressources.
Ainsi, il est indispensable de desserrer les contraintes auxquelles médecins et soignants sont trop souvent assujettis pour permettre à chacun de mieux satisfaire les exigences spécifiques à ses missions.
Les activités médicales et paramédicales, comme chacun sait, sont, par construction, dévoreuses de temps.
Chacun souhaiterait pouvoir se concentrer davantage sur son cœur de métier. Les médecins, par exemple, doivent pouvoir s’affranchir davantage des tâches administratives, en les déléguant à des personnels non-médicaux.
Chacun voudrait être en mesure d’exploiter au mieux ses compétences. Très concrètement, les infirmiers effectuent un trop grand nombre d’actes qui occupent leur temps sans solliciter leurs compétences propres quand, dans le même temps, les médecins sont débordés par des actes de suivi qui pourraient être assurés par des infirmiers formés à cela.
Dans cette optique, le projet de loi que je porterai, dès l’automne, devant le Parlement, accordera la place qu’elle mérite à la question du partage des compétences.
Il faut tirer vers le haut les compétences de chacun. Il faut laisser à chacun la possibilité d’évoluer tout au long de sa vie, au rythme des techniques médicales.
Dans cette perspective, il est grand temps de rénover la formation des paramédicaux. Cette formation, en effet, doit être mieux adaptée à l’exercice actuel de leurs fonctions et leur permettre d’accomplir des tâches dont les médecins peuvent être affranchis.
Leur formation doit intégrer le processus européen de Bologne et le « LMD » ou licence, mastère, doctorat. Cette intégration valorisera ces métiers et augmentera leur attractivité, au plus grand bénéfice des patients. Cette réforme LMD est une réforme de grande ampleur, qui prendra du temps car elle suppose de repenser les formations, le temps de travail, la durée d’activité et les responsabilités. C’est une belle réforme, qui doit être appréhendée globalement, avec tous les acteurs concernés.
La valorisation des parcours professionnels est au cœur des mes préoccupations, comme vous avez pu le constater dans l’annonce récente d’un plan « santé outre-mer » qui vise justement à reconnaître cette expérience forte que représente un poste dans nos départements ultramarins.
Il faut, dans le même esprit, repenser la formation médicale continue et l’évaluation des pratiques professionnelles. Je souhaite ainsi transformer l’obligation de formation médicale continue qui est aujourd’hui une obligation de moyens en obligation de résultat. Notre système de formation continue est, en effet, trop complexe, trop administratif. Il ne produit pas nécessairement les résultats que les professionnels et les patients sont en droit d’attendre. Il faut en appeler davantage à la responsabilité de chacun. Des professionnels de santé de haut niveau n’ont pas besoin d’être surveillés comme des enfants et que l’on vérifie s’ils ont bien effectué telle ou telle démarche de formation. Des cadres supérieurs peuvent se former toute leur vie, en empruntant les voies qu’ils jugent les mieux adaptées à leurs pratiques. Ils peuvent ainsi, par exemple, juger plus efficace et utile de puiser leurs informations à des sources variées, comprenant les multimédias, plutôt que d’assister à tel ou tel congrès.
C’est dans cet esprit de responsabilité que je souhaite placer la question de la formation des cadres de santé au cœur de ma réforme.
La réforme des hôpitaux, conçue pour améliorer au long cours la qualité et la sécurité des soins, ce sont les personnels qui lui donneront corps. Un hôpital, ce sont des équipes, avant d’être des équipements : des hommes et des femmes, et non des chiffres abstraits réductibles à des statistiques.
Ainsi, le nécessaire renforcement des liens entre la ville et l’hôpital implique une évolution des pratiques, une plus grande porosité entre les cultures hospitalières et ambulatoires. Ville et hôpital ne sont pas deux mondes séparés, destinés à s’ignorer.
Dès lors, pourquoi ne pas imaginer que des infirmiers puissent exercer à l’hôpital une fonction de conseil d’orientation de manière à préparer la sortie ? Le rôle des cadres de santé, qui ont pu apparaître comme les oubliés de la nouvelle gouvernance et dont on sait pourtant l’importance pour le fonctionnement d’une équipe, devra bénéficier d’une attention particulière.
Réciproquement, comment imaginer que les médecins de ville puissent se sentir coupés de l’hôpital ?
Il y aurait, au contraire, tout avantage à ce qu’un plus grand nombre de médecins, exerçant en libéral, aient l’occasion de pouvoir travailler une journée par semaine à l’hôpital, s’ils le souhaitent.
Les généralistes, pivot incontestable de notre système de soins, doivent pouvoir entretenir avec le monde hospitalier des relations régulières et privilégiées.
C’est l’intérêt du patient.
C’est aussi l’intérêt réciproque des médecins de ville et des hospitaliers que de pratiquer ainsi de fructueux échanges. Ce sont les médecins de ville qui orientent les patients vers tel ou tel hôpital. C’est au médecin de ville que l’hôpital doit adresser le retour d’information nécessaire au suivi médical de leurs patients. Le DMP sera, à cet égard, un outil essentiel pour faciliter la continuité et la coordination des soins entre professionnels de santé.
Les termes de cette nouvelle relation entre la ville et l’hôpital seront définis territorialement par les agences régionales de santé.
Notre évolution démographique nous oblige également à repenser nos relations avec nos aînés. Dans le même esprit d’égalité et de solidarité. C’est pourquoi nous mettrons l’accent sur leur prise en charge « globale », sur le modèle du « plan Alzheimer » destiné à ceux d’entre eux touchés par cette terrible maladie.
Ma réforme, préparée dans un esprit de concertation, en appelle donc à la responsabilité collective de toutes celles et de tous ceux qui font vivre notre système de soins.
Cette réforme dont l’ampleur et la portée inédites sont à la mesure de l’enjeu historique, est une réforme nécessaire, une réforme attendue.
La rénovation de nos pratiques, la modernisation de nos structures, dont dépendent la qualité et la sécurité des soins, reposent sur notre volonté commune d’agir sans tarder pour que notre système de soins conserve la réputation d’excellence qui fonde la confiance qu’il inspire.
Les Français ont confiance en leur hôpital. L’hôpital doit avoir confiance en lui-même, en sa capacité de répondre au défi de la modernisation.
Plus souple, plus réactif, l’hôpital de demain, pour accomplir ses missions, devra bénéficier d’un pilotage exemplaire et s’organiser, fédérer toutes les énergies autour d’un projet médical bien défini.
Ainsi, comme suite au souhait exprimé par Nicolas Sarkozy dans son discours de Bordeaux, et dans la lignée des recommandations de la commission dirigée par Gérard Larcher que je tiens à remercier tout particulièrement pour son rapport et qui, je ne l’oublie pas, a été le président de la FHF, je souhaite que le directeur d’hôpital dispose de tous les moyens nécessaires au pilotage d’une structure lourde qui soigne des millions de patients par an et gère des centaines de personnes au quotidien. Le secteur hospitalier, c’est près de 20 millions de séjours, près d’un million de personnes à son service. Notre pays y consacre 67 milliards d’euros par an. Nous nous devons d’être exigeants.
La responsabilisation de tous est le juste corolaire de la confiance suscitée. Il faut, en ce sens, que chaque établissement puisse s’organiser pour rassembler les personnels dans une démarche commune visant à assurer la meilleure qualité et la plus grande sécurité des soins. Il faudra sans doute simplifier les procédures, supprimer les commissions inutiles et les comités dont l’excessive lourdeur est souvent constatée. Avec la certification, l’heure n’est plus aux contrôles tatillons. La qualité du service hospitalier suppose plutôt une véritable politique de gestion des risques opérationnels, une politique qui en appelle au sens de la responsabilité.
C’est autour d’un projet médical clairement établi que doit s’organiser l’hôpital, un projet dont chacun doit se sentir co-responsable. L’organisation en pôles sera poursuivie ; les chefs de pôles verront leur autonomie renforcée. Ce travail en commun participera de l’attractivité des carrières hospitalières. L’isolement, le sentiment d’abandon, sont responsables de trop de malaise chez les praticiens hospitaliers.
Cette philosophie de la responsabilité détermine l’esprit de notre réforme.
L’exigence de transparence s’inscrit dans cette logique. Ainsi, on ne garantit pas la qualité et la sécurité, en créant par décret des commissions ad hoc : on publie par exemple, les chiffres des maladies nosocomiales. La publication d’indicateurs de résultats est un bon moyen de susciter l’engagement responsable de tous. Je souhaite aller plus loin, notamment avec les indicateurs COMPACQ, la généralisation de SAPHORA, indicateur de satisfaction du patient. Il faut ainsi savoir fixer clairement des objectifs atteignables, si l’on veut contrarier le tropisme de l’inertie. A titre d’exemple, j’ai fixé à mes services cet impératif responsable : que ma prochaine loi supprime plus d’articles des codes qu’elle n’en crée ! J’espère que nous réussirons.
Ne subissons pas comme une fatalité l’inflation législative et réglementaire qui ne simplifie la vie de personne et que nos concitoyens réprouvent !
Evitons aussi de subir plus longtemps l’engrenage d’une mauvaise gestion dont les plus précaires, les plus vulnérables sont toujours les premiers à ressentir les contre coups !
Si j’en appelle à la responsabilité, en effet, c’est au nom de l’exigence supérieure de justice, au nom du principe de solidarité qui doit continuer à soutenir notre édifice de soins.
C’est en ce sens que je veux faire évoluer la tarification à l’activité instaurée depuis 2005.
Ce dispositif, en mettant fin à la logique d’enveloppe pour un financement en fonction du besoin des établissements, constitue un progrès majeur du mode de financement des hôpitaux. Cependant, dans un esprit de justice, je souhaite au moins introduire deux inflexions visant à mieux prendre en compte la situation de précarité de certains patients et à mieux assurer la rémunération des prises en charge les plus lourdes qui peuvent toucher tout un chacun.
Le modèle actuel de tarification à l’activité ne tient à mon avis pas assez compte de la situation sociale des patients. Or, un grand nombre d’études mettent en évidence que la durée de séjours de ces patients est supérieure à la moyenne, pour toutes les pathologies.
La prise en charge par l’hôpital de ces patients en situation de précarité est donc plus longue, plus coûteuse. Or, certains établissements accueillent une proportion de patients en situation de précarité plus élevée que la moyenne nationale et exposent ainsi des coûts plus élevés alors que le tarif baisse après une durée de séjour moyenne.
Il faut donc veiller à ce que le modèle de financement ne dissuade pas l’établissement hospitalier d’accueillir certaines catégories de la population, ce qui serait contraire aux principes de solidarité qui sont les nôtres !
Aussi, je veux accroître les ressources allouées aux établissements ayant une proportion importante de patients en situation de précarité, cette précarité étant mesurée par le nombre de patients bénéficiaires de la CMU, de l’AME, du RMI, ou sans solution de logement stable durable.
Poursuivant un même objectif de justice dans le financement, j’ai décidé de faire évoluer la tarification des prestations. Une nouvelle version, dite version 11, entrera en vigueur pour la prochaine campagne tarifaire. Cette nouvelle version prévoit une meilleure prise en compte des niveaux de sévérité qui permettra de mieux rémunérer les prises en charges les plus lourdes.
La tarification à l’activité impose un effort d’adaptation des établissements. La situation de certains d’entre eux suscite l’inquiétude. Or c’est précisément parce que ces efforts d’adaptation n’ont pas toujours été réalisés à temps que nous sommes confrontés aujourd’hui à des niveaux de déficits dans certains cas alarmants.
Le retour à l’équilibre financier des hôpitaux est une priorité. Il est nécessaire pour préserver l’excellence de nos établissements, il est le garant de l’hôpital public dans le temps. Le président de la République a fixé le cap de 2012 pour le retour à l’équilibre, mais les efforts doivent commencer dès aujourd’hui ! Dans son discours de Neufchâteau, Nicolas Sarkozy a aussi parlé de la nécessaire exemplarité, dans ce registre, de nos grands CHU, et notamment de l’AP-HP, des Hospices civils de Lyon et de l’AP-HM. A tous les gestionnaires qui sont, sur le terrain, engagés dans cet effort, je dis et redis mon soutien et ma détermination à aider ceux qui s’engagent le plus.
C’est pourquoi vous me trouverez à vos côtés pour les efforts de modernisation et d’investissement de l’hôpital.
Il y a un an, je m’apprêtais à faire paraître la première circulaire Hôpital 2012, avec l’engagement de mettre près de 10 milliards d’euros au service de l’investissement hospitalier, qu’il s’agisse d’infrastructures ou de systèmes d’information qui sont clairement la clé de notre avenir. J’ai eu l’occasion de rappeler à maintes reprises mes exigences pour ce plan : pas de saupoudrage, des projets en adéquation avec les priorités régionales, favorisant les coopérations, et offrant un retour sur investissement satisfaisant.
J’ai le plaisir de constater aujourd’hui que le travail que nous avons mené a porté ses fruits. Ce plan est plus que jamais l’outil de notre politique : nous allons par exemple accompagner le CH de Cahors à se restructurer en fusionnant deux sites à hauteur de 12,5M€ (pour un projet de 25M€, soit 50%).
L’offre de soins poursuivra sa modernisation en Bourgogne avec la participation aux opérations de restructuration des sites de Nevers, Mâcon et Dijon, pour un total de 10M€ environ.
C’est bien, en effet, ma vision de l’hôpital de demain et la certitude que nous partageons des valeurs fortes qui inspire aujourd’hui les choix d’une réforme d’envergure.
Le projet de loi Santé, patients, territoires sera, en ce sens, le principal pilier d’une politique de santé globale, conçue comme une politique de justice. Il donnera lieu à une large concertation avec les organisations syndicales, les associations de patients, les intersyndicats de praticiens hospitaliers, les syndicats de médecins libéraux, les conférences et les fédérations hospitalières.
La finalité générale de cette loi est d’assurer à chacun comme à tous des prestations –de prévention comme de soins- de la meilleure qualité, sans faire porter le poids d’une dette incontrôlée aux générations futures.
Les deux lignes de force de ce projet ambitieux sont la territorialisation et la responsabilisation des acteurs qu’implique l’exigence de solidarité nationale. Il déclinera le plan d’actions dans différents champs (médecine ambulatoire, hôpital, santé publique) sur la base des constats et des recommandations issus des états généraux de l’organisation de la santé, du rapport Larcher et du rapport Flajolet. La création des agences régionales de santé en constituera l’un des volets essentiels.
La création des agences régionales de santé procède d’un choix stratégique fondamental : renforcer résolument le pilotage territorial, au plus près des besoins de la population. Il s’ensuit deux grands principes constructifs pour les ARS : elles réuniront les services de l’Etat et de l’assurance maladie –pilotage unifié- et devront favoriser la responsabilisation de tous les acteurs –pilotage responsabilisé.
Les ARS, malgré la technicité apparente de leur conception, tirent leur raison d’être de la nécessité d’assurer à tous nos concitoyens, sur tout le territoire, l’accès à des soins de qualité.
La finalité de cette réforme structurelle est de renforcer l’ancrage territorial des politiques de santé, qui doivent être mieux adaptées aux besoins locaux, et d’assurer une répartition plus juste de l’offre de soins, pour lutter notamment contre les déserts médicaux dont un trop grand nombre de Français, notamment dans les banlieues et en milieu rural, constatent avec inquiétude l’extension.
Parce que nos concitoyens ne sont pas, non plus, également armés pour affronter des parcours de soins à la cohérence incertaine, il faut battre en brèche la logique du cloisonnement dont pâtit notre système, et sortir enfin de l’hospitalocentrisme. Les ARS y contribueront.
Les ARS veilleront, enfin, à assurer la simplification du système de santé, actuellement éclaté entre de multiples organismes, et à offrir un interlocuteur unique aux acteurs du système et à nos concitoyens qui s’y perdent.
Pour répondre aux grands enjeux de santé de notre pays, il fallait une réforme globale et ambitieuse.
Cette réforme doit se faire. Cette réforme se fera. Cette réforme se fera avec vous !
Les principes de solidarité, de responsabilité et d’amélioration continue de la qualité en déterminent clairement l’orientation.
Nous sommes aujourd’hui collectivement responsables de la pérennité et de l’effectivité des principes qui sont les nôtres.
J’ai toujours été au rendez-vous de la concertation. Soyons maintenant, tous ensemble, au rendez-vous de la réforme !
Je vous remercie.