Qu’il agisse de la directive européenne sur le temps de travail (voir notre dépêche ci-dessous), de certains aspects de la réforme hospitalière en cours de préparation, du statut des médecins à temps partiel ou de la retraite complémentaire des praticiens hospitaliers, la Confédération des praticiens des hôpitaux (CPH) et l’Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (Inph) n’ont pas de mots assez durs pour condamner la politique hospitalière du gouvernement.
Décrivant le contexte général de la politique hospitalière, le Dr Rachel Bocher, présidente de l’Inph, a affirmé mercredi lors d’une conférence de presse commune aux deux syndicats que « les missions des hospitaliers sont en constante augmentation », notamment en matière de soins non programmés, de prise en charge de la précarité ou des polypathologies sans que pour autant « les moyens financiers et humains soient mobilisés ». La présidente de l’Inph accuse Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, de mettre en œuvre une politique « du tout libéral (…) en provenance de l’Elysée ». En agissant de la sorte, en affaiblissant l’hôpital public, souligne en substance Rachel Bocher, « on remet les clés d’une partie du système de santé dans les mains des fonds de pensions américains » (ndlr : qui investissent en France dans l’hospitalisation privée). Analyse partagée par Pierre Faraggi, président de la CPH pour qui « la santé est une affaire trop sérieuse pour être livrée au marché et à la concurrence ».
Au-delà de ce procés en libéralisme, les deux intersyndicats dénoncent, entre autres, les mesures concernant la gouvernance des hôpitaux prévues dans le cadre de la réforme hospitalière en préparation. « Nous ne sommes pas en manque de réformes, souligne Pierre Faraggi. A mettre l’hôpital en ébullition, en révolution permanente on désorganise nos équipes ». Autre projet critiqué : celui qui consisterait à laisser aux praticiens hospitaliers le choix entre trois possibilités (le cadre statutaire actuel, un cadre statutaire aménagé comprenant une part fixe de rémunération associée à une part définie en fonction de différents objectifs et de différentes activités, et un cadre contractuel). La création d’un cadre contractuel inciterait les praticiens à délaisser l’hôpital, estime le président de la CPH, dans la mesure où les établissements publics ne seront jamais en mesure d’offrir à ces contractuels des conditions comparables à celles proposées par les cliniques. Plus grave encore pour les deux syndicats : le statut de contractuel porte en germe « la perte de l’indépendance du praticien hospitalier ». C’est la revalorisation du statut actuel de PH et la revalorisation des praticiens assurant la permanence des soins qui permettront, selon le CPH, de renforcer l’attractivité de l’hôpital auprès des jeunes médecins.
Le Dr Faraggi se défend cependant d’être hostile à toute réforme. Il approuve ainsi le principe de la création des agences régionales de santé et il n’est pas opposé « à la création, pourquoi pas, de communautés hospitalières de territoire » pourvu que les hôpitaux publics « demeurent le garant et le pivot du service public ». L’Inph et la CPH seront reçus au ministère de la Santé la semaine prochaine, en même temps que les deux autres organisations de praticiens hospitaliers (la Coordination médicale hospitalière et le Syndicat national des médecins des hôpitaux publics), dans le cadre de la concertation sur la réforme hospitalière.
La CPH et l’Inph s’offusquent également de la non revalorisation « au jour d’aujourd’hui » du statut des praticiens à temps partiel alors que le gouvernement a pris des engagements en la matière. Ils soulignent l’incertitude qui pèse sur leur retraite complémentaire, l’Ircantec, en difficulté et faisant actuellement l’objet de discussions. Une nouvelle réunion est prévue cette semaine au ministère de la Santé sur le dossier qui ne concerne pas que les médecins des hôpitaux mais tous les agents non titulaires de l’Etat.
Les deux syndicats ont indiqué qu’ils participeront également la semaine prochaine à une journée d’action et de sensibilisation sur la pénibilité au travail.