(Par Caroline BESNIER)
PARIS, 20 juin 2008 (APM) – Le gouvernement prévoit de réformer le régime de retraite complémentaire Ircantec, à laquelle cotisent les praticiens des hôpitaux, en réduisant fortement le taux de rendement, c’est-à-dire le rapport entre le montant des pensions perçues et le montant des cotisations versées au cours de la vie active.
Les dernières projections des services techniques de l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques (Ircantec) pour le Conseil d’orientation des retraites (COR) estiment que le régime présentera un solde déficitaire entre 2012 et 2016 et aura épuisé ses réserves entre 2025 et 2030.
Des discussions avaient été entamées en 2005 pour réformer le régime mais elles avaient été arrêtées quelques mois plus tard, rappelle-t-on. Les réunions avec les syndicats de praticiens ont repris depuis quelques semaines et la troisième a eu lieu mercredi.
Un document d’orientation relatif à la réforme des paramètres de l’Ircantec et aux mesures de simplification, dont APM a eu copie, détaille les propositions du gouvernement qui ont été présentées mercredi aux syndicats de praticiens.
Elles visent à permettre au régime de respecter deux critères de solvabilité: garantir le paiement des pensions sur une durée de 30 ans et disposer d’une réserve de précaution à 20 ans équivalente au minimum à une année et demie de prestations.
Le gouvernement indique qu’il n’y aura aucune modification des règles pour les pensions en cours et les points déjà comptabilisés.
Néanmoins, il table sur une évolution du rendement pour les droits acquis à partir de 2009.
Le rendement est actuellement fixé à 15,11% en théorie et à 12,09% réellement c’est-à-dire que chaque euro cotisé restitue 12,09 centimes de pension par an. « Ce taux est très supérieur au niveau d’équilibre » car le régime verse beaucoup plus qu’il ne reçoit, le retraité percevant en moyenne l’intégralité des cotisations versées en 6,6 ans de versement de la rente, souligne le document en rappelant que le rendement servi par les régimes Agirc/Arrco, gérés par les partenaires sociaux du secteur privé, est fixé à un peu plus de 5%.
La réforme prévoit de faire passer progressivement le taux de rendement réel à 7,75% en 2015.
« L’ajustement du rendement du régime s’effectuera par le relèvement du salaire de référence », ajoute le document.
Par ailleurs, le gouvernement prévoit un relèvement « progressif et partagé » des cotisations employeur et salarié (de 5,625% à 7% en tranche A et de 17,5% à 19,5% en tranche B)
UNE RESPONSABILITE ETENDUE DU CONSEIL D’ADMINISTRATION
Le gouvernement propose également de confier le pilotage des paramètres du régime au conseil d’administration de l’Ircantec à compter de 2015, c’est-à-dire au terme de la révision des paramètres.
Le conseil d’administration devrait ensuite fixer par période de quatre ans l’évolution des paramètres (valeur d’achat du point retraite, valeur de service du point, taux de cotisation employeur et salarié).
Si le conseil d’administration a besoin d’un délai pour adopter un nouveau plan, en cas de non-respect des critères de solvabilité à long terme, le gouvernement propose un « mécanisme automatique » ajustant les valeurs de service et d’acquisition du point et le taux de cotisation.
Il est par ailleurs prévu de modifier la composition de conseil d’administration. Un siège serait ajouté pour le syndicat Solidaires aux 15 membres représentants les salariés. Pour le collège des employeurs publics (16 membres), les sièges des représentants de l’Etat seraient réduits à huit. De plus, quatre administrateurs représenteraient les employés territoriaux et quatre administrateurs les employeurs hospitaliers (désignés par la Fédération hospitalière de France, FHF).
Deux sièges seraient créés et confiés à des personnalités qualifiées désignées par les ministères de tutelle de l’Ircantec, dont un choisi parmi les praticiens hospitaliers.
Enfin, le fonctionnement du conseil d’administration pourrait également être modifié.
LA CGT DENONCE 25% DE BAISSE DES RETRAITES
L’Union générale des fédérations de fonctionnaires (UGFF) CGT dénonce vendredi dans un communiqué une « dramatisation artificielle de la situation de l’Ircantec » et estime qu' »aucun déficit technique n’est prévisible avant 2020, voire 2035 si l’on prend en compte les réserves accumulées ».
Pour l’organisation syndicale, le projet de réforme est encore « plus pénalisant » que celui proposé en 2005 et « retiré dans la précipitation devant le mouvement de protestation unitaire des salariés concernés ». Elle évoque plus de 20% (tranche A) et près de 30% (cadres) de baisse du taux de remplacement, c’est-à-dire du rapport entre le montant de la retraite et le dernier salaire, qui s’établit actuellement à environ 55% pour un PH à temps plein.
« En prétendant ‘assurer’ l’avenir par ‘des réserves de précaution’ considérables et fortement consommatrices en financement supplémentaire, les ministres poursuivent leur double objectif : affaiblissement progressif de la répartition solidaire et dégagement d’un large espace pour les institutions financières et leurs produits par capitalisation », met en garde la CGT.
Contacté par l’APM, Christophe Prudhomme, administrateur CGT au CA de l’Ircantec, a déploré l’absence de concertation autour de la réforme et la volonté du gouvernement de « passer en force dès le mois de juillet ».
Une réunion est prévue lundi 30 juin entre le ministère en charge de la fonction publique et les organisations syndicales et une session extraordinaire du conseil d’administration de l’Ircantec pourrait avoir lieu le 15 juillet pour valider les textes
La CGT propose de ne pas baisser le taux de rendement mais plutôt d’augmenter les cotisations employeurs et salariés de cinq points, ce qui reste toujours inférieur aux taux appliqués aux titulaires de la fonction publique.
cb/eh/APM polsan
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