Traçabilité, évaluation, efficience, responsabilisation : telle est la langue de bois qui dissimule cette dégradation, cherchant à persuader chaque soignant que, si problème il y a, c’est lui seul qui en est la cause. Cette méthode de « gouvernance » du management d’entreprise néolibéral, importée dans le service public de psychiatrie, vise donc à culpabiliser et diviser chacun d’entre nous jusqu’à l’erreur individuelle, ou l’épuisement psychologique.
Comment nous, soignants en psychiatrie, pourrions-nous être dupes de cette aggravation de notre souffrance professionnelle, comme de la souffrance sociale en général ? Comment ne pas voir que, sous couvert de « progrès » technologiques comme les PTI, l’informatisation du dossier de soin, les protocoles multiples, on occulte encore la réalité en augmentant insidieusement le contrôle sur les patients comme sur nos actes ? Comment ne pas comprendre, à travers la pression croissante des admissions, qu’on nous demande de plus en plus d’être les garde-fous de la précarisation économique et de la dérive sécuritaire du système socio-politique actuel ?
Il serait temps de quitter la posture individualiste de soumission craintive qu’on nous impose, et de nous réapproprier solidairement le sens de notre travail ! Dr Olivier LABOURET, Vice-président de l’USP