Article du Quotidien du médecin du 19 juin 2009 : HPST : Le projet de loi dans la dernière ligne droite

La commission mixte paritaire est parvenue à un compromis équilibré

UNE JOURNÉE aura suffi à la commission mixte paritaire pour examiner le projet de loi HPST (Hôpital, patients, santé, territoires). Les parlementaires, sept députés, sept sénateurs, ont passé en revue près de 120 amendements. Plusieurs modifications ont été adoptées, qui, sans bouleverser l’esprit de la réforme Bachelot, ont un impact direct sur l’exercice médical en ville et à l’hôpital (voir ci-dessous). De façon emblématique, la CMP a fixé un ultimatum au 15 octobre 2009 pour l’aboutissement du secteur optionnel. Sur l’ensemble des polémiques qui ont animé le débat parlementaire ces trois derniers mois (gouvernance hospitalière, testings, assurance des obstétriciens…), la CMP a su trouver un compromis. Plusieurs députés ont exprimé leur frustration d’avoir été court circuités sur les amendements Marescaux (réforme des CHU), mais le débat n’a pas pris la tournure explosive annoncée car les deux majorités parlementaires avaient accordé leurs violons en amont.

Prochaine étape pour le texte HPST : la lecture des conclusions de la CMP, suivie du vote dans chacune des deux chambres – à l’Assemblée nationale le 23 juin, au Sénat le 24 juin. Le vote est avant tout symbolique : les parlementaires ne peuvent plus modifier la copie. En revanche, le gouvernement reste libre de déposer des amendements durant cette dernière lecture. Commentaire de Jean-Pierre Door, député UMP du Loiret : « Des amendements surprises pouvant mettre le feu aux poudres ne sont pas souhaitables. Nous sommes parvenus à un texte équilibré ». La promulgation de la loi Bachelot pourrait ensuite être rapide, deux à trois semaines après le vote. Sauf si le Conseil constitutionnel est saisi. « L’ensemble des parlementaires socialistes y songent, pour deux raisons : les amendements Marescaux n’ont été examinés que par les seuls sénateurs. Et les débats dans chacune des deux chambres se sont déroulés avec des règles différentes », expose Bernard Cazeau, sénateur PS de Dordogne. Le Conseil constitutionnel, une fois saisi, dispose d’un mois pour rendre son avis – un délai ramené à huit jours en cas d’urgence demandée par le gouvernement. La promulgation de la loi est donc attendue au plus tard pour la fin du mois de juillet.

DELPHINE CHARDON

Ce que la CMP a adopté

– Hôpital (titre I) : la CMP est restée fidèle à la version sénatoriale s’agissant de la gouvernance hospitalière, malgré les pressions des députés pour revenir à une ligne plus « pro-directeurs ». Le président de la CME prépare le projet médical, qu’il exécute conjointement avec le directeur d’hôpital, lequel est nommé par le directeur de l’ARS (Agence régionale de santé) à partir d’une liste de trois noms. Pas d’avis conforme pour les nominations médicales : le président de la CME propose des noms au directeur, qui tranche en cas de désaccord. La clause de non concurrence qui interdit à un praticien de s’installer en libéral à proximité de son hôpital, ne s’appliquera qu’à ceux ayant un minimum de cinq ans d’ancienneté. « Nous sommes partis du principe qu’il faut au moins cinq ans pour se faire une clientèle », explique un membre de la CMP. Les PH ayant moins de cinq ans d’ancienneté sont libres de rester ou de partir en face dans le privé.

– Médecine de ville et accès aux soins (titre II) : la CMP a introduit une date butoir pour l’aboutissement des discussions sur le secteur optionnel. En cas d’échec des discussions le 15 octobre 2009, le gouvernement pourra limiter les dépassements d’honoraires, en pourcentage ou en montant, par arrêté (un arrêté qui pourrait donc s’intégrer dans le PLFSS 2010). Explications de Jean-Pierre Door, l’un des trois députés qui a déposé l’amendement : « Les freins sur le secteur optionnel ont assez duré. Il s’agit d’inciter les parties conventionnelles à se mettre autour de la table. Cette mesure, c’est une solution de sagesse, et un appel aux médecins pour qu’ils prennent leurs responsabilités. Ils ne peuvent s’y opposer car ils savent bien que la situation ne peut pas durer ». Du nouveau aussi pour le parcours de soins : alors que le Sénat avait entériné la possibilité d’un accès direct aux gynécologues, ophtalmologues, et psychiatres sans prescription par un médecin traitant, ou en l’absence du choix d’un médecin traitant, la CMP a supprimé cette disposition, pour revenir à la version initiale de la convention.

Les contrats santé solidarité sont maintenus.

A contrario, les testings sur les refus de soins ont été supprimés, ainsi que l’interdiction, sous la pression du gouvernement, des recours de l’ONIAM (Office national d’indemnisation des accidents médicaux) contre les médecins de secteur 1 pour des sinistres de plus de 3 millions d’euros. C’est donc le statu quo en matière de responsabilité civile professionnelle.

– Santé publique (titre III) : plusieurs actions ont été ajoutées pour mieux prévenir l’obésité. Les pharmaciens pourront renouveler les ordonnances médicales de pilule contraceptive pour trois mois.

– Agences régionales de santé-ARS- (titre IV) : peu d’évolution sur ce chapitre, pilier de la réforme. La CMP a maintenu le principe des trois collèges (spécialistes, généralistes, plateaux techniques) dans le cadre des prochaines élections professionnelles. La composition du conseil de surveillance des ARS a été relookée. Une ARS ne sera pas obligatoirement présidée par le préfet ; elle pourra l’être, de façon expérimentale, par une personnalité qualifiée.

DCH