Après la loi HPST, des états généraux sont demandés
22.10.09 – 17:58 – HOSPIMEDIA |Rien ne va plus dans les CHU. Sociologues, économistes, politiques et hospitaliers l’ont rappelé mercredi à la faculté de médecine de la Pitié Salpêtrière lors d’un colloque. La solution préconisée par André Grimaldi qui doute de la loi HPST, est l’organisation d’états généraux.
Difficile d’ignorer les difficultés financières des CHU rapportées encore récemment dans un rapport signé par Jacques Marescaux. Cette situation est-elle la conséquence directe d’une crise de vocation ou d’une crise de confiance, se sont demandés les participants mercredi au colloque* organisé à la faculté de médecine de la Pitié Salpêtrière ? Si l’existence d’un profond malaise est clairement reconnue par tous, ses origines sont diversement expliquées en fonction des interlocuteurs. Certains choix politiques comme la Tarification à l’activité (T2A) ou la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) ont été présentés comme accentuant les tensions.
L’épineuse problématique de la T2A
La journée a débuté par une réflexion sur la T2A, sujet sensible qui déchaîne toutes les passions. Dans la salle, les propos des intervenants ont provoqué applaudissements ou contestations. Didier Tabuteau, responsable de la chaire santé à Sciences Po a parlé d’un
> certain consensus d’insatisfaction chez les professionnels. Il s’est étonné que l’évolution du système hospitalier actuellement engagée repose sur ce mode de financement. Ne faudrait-il pas inventer un nouveau dispositif, a-t-il suggéré ? Tous les intervenants sur la T2A ont dans le même temps refusé un quelconque retour à l’ancien mode de financement sous dotation globale. La T2A apparaît donc comme un moindre mal.
Gérard de Pouvourville, professeur titulaire de la Chaire ESSEC santé a pour sa part invité les établissements non seulement au retour à l’équilibre budgétaire mais surtout à dégager des marges d’exploitation pour « être autonomes et investir librement ». Pour lui, les déficits des établissements les lient trop étroitement à leurs financeurs. Dans l’assistance, les expressions « hôpital-entreprise » ou « hôpital-industrie » se sont alors faites entendre.
Les spécificités des CHU
Pour expliquer voire peut-être excuser les pertes financières des CHU, certains intervenants ont mis en avant leurs spécificités, à la fois faiblesses et atouts. Pour l’économiste Gérard de Pouvourville, il faut sortir le patrimoine des établissements du financement des CHU. « Ce n’est pas à l’assurance maladie de payer les rénovations coûteuses des anciens bâtiments », a-t-il déclaré. Une grande partie de certaines dettes serait, à son avis, liée à des réhabilitations. Pierre-Louis Bras, inspecteur général des affaires sociales, a pour sa part indiqué, que la recherche se présentait également comme une charge importante. Et d’ajouter qu’un établissement « améliore son équilibre s’il développe ses activités de soins et le dégrade en développant sa recherche » clinique, par exemple. Investir dans la recherche est un choix stratégique, attractif pour les professionnels mais sans garantie financière. Ce qui pose un véritable dilemme. Il a aussi été question des financements des missions spécifiques des CHU comme les missions d’enseignement et de recherche (MERRI) ou les Missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC). Dans ce contexte particulier, la campagne menée par la Fédération hospitalière privée (FHP) pour un tarif unique a notamment été fustigée par Gérard Vincent, délégué général de la Fédération hospitalière de France (FHF). Il la considère comme une attaque du service public hospitalier dans son ensemble. Il est vrai que les acteurs des CHU se sont présentés comme les défenseurs du service public hospitalier pendant cette journée critiquant la convergence tarifaire d’établissements différents, a relevé en conclusion Didier Tabuteau.
CHU et service public même combat
André Grimaldi, chef de service de diabétologie-métabolisme au groupe hospitalier Pitié-Salpetrière mais aussi président du Mouvement de défense des hôpitaux publics (MDHP) a proposé d’organiser des états généraux des CHU pour mettre à plat l’ensemble des dysfonctionnements relevés pendant cette journée. Son mouvement a vivement contesté la loi HPST pendant ses discussions et il reste extrêmement méfiant. Dans l’assistance, Christian Saout, président du Collectif interassociatif sur la santé (CISS) a salué la proposition d’André Grimaldi, tout en indiquant qu’elle sera difficile à mettre en place. La loi HPST réorganisant l’offre de soins vient d’être votée cet été. Des états généraux relanceraient les débats sur l’hôpital signifiant que la loi est incomplète. Pour Christian Saout, seuls les conseillers régionaux pourraient avoir le courage politique d’organiser les états généraux des CHU. Les intervenants du colloque issus d’univers divers sont intervenus librement, enrichissant les échanges. Difficile toutefois en une journée d’aborder tous les aspects. A la clôture de la manifestation, Pierre Coriat, vice-président de la conférence des présidents de Commission médicale d’établissement (CME) des CHU, a annoncé qu’une nouvelle journée réunissant les mêmes partenaires pourrait être proposer dans six mois. A ce moment-là, la loi de financement de la sécurité sociale sera votée et on peut imaginer que la proposition d’André Grimaldi aura été entendue.
Lydie Watremetz
*La journée était proposée conjointement par : la conférence des présidents de Commission médicale d’établissement (CME) des CHU, la chaire de santé de Sciences Po, la conférence des doyens de facultés de médecine, la conférence des présidents d’universités et le centre
> d’analyse des politiques publiques de santé de l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP).