Après la menace de démission du professeur Coriat, président de la Commission médicale d’établissement (CME) le parlement des médecins de l’Assistance publique- hôpitaux de Paris, celles effectives des professeurs Bensman (hôpital Armand Trousseau) et du professeur Lejonc( Hôpital Henri Mondor), le Mouvement de Défense de l’Hôpital Public (MDHP) révèle dans un communiqué publié le 27 novembre que « plus de 700 responsables médicaux (….), se sont engagés à démissionner collectivement de leurs fonctions médico-administratives ou à ne pas remplacer les démissionnaires, si le plan de suppression d’emplois soignants annoncé pour 2010 est maintenu ».
Le communiqué « dénonce l’attaque lancée par le ministère de la Santé contre l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) » et précise « Alors que la ministre a répété qu’elle ne supprimerait aucun emploi dans les hôpitaux, elle impose à l’AP-HP, en dehors de tout projet médical, une réduction budgétaire de 100 millions d’euros par an pendant 3 ans, entraînant mécaniquement la suppression chaque année d’environ 150 emplois de médecins et 1 000 emplois de soignants non-médecins, après les 700 suppressions déjà réalisées en 2009 ».
Pour répondre aux exigences du ministère de la Santé, signale le MDHP « la direction générale de l’AP-HP, réduite au rôle d’un simple exécutant, impose aux directeurs des différents hôpitaux de l’AP-HP de supprimer des postes médicaux et non médicaux sans le moindre discernement ni la moindre logique médicale. Cette politique est inacceptable car elle entraîne une dégradation de l’accès aux soins et de la qualité des soins, contrairement à ce que prétendent le ministère de la Santé et la direction générale de l’AP-HP ».
Assemblée générale le 15 décembre
Le communiqué poursuit « la communauté médicale souhaite que soit mise en œuvre une politique ambitieuse de modernisation et de réorganisation de l’AP-HP, pensée sur le long terme, garantissant que l’AP-HP assure des soins de qualité accessibles à tous et participe au progrès médical.
Cette réorganisation nécessite une politique d’investissements importants pour que tous les patients de l’AP-HP soient accueillis dans des conditions dignes, et soignés selon les exigences de la médecine du XXIe siècle, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle. Cette modernisation impose aussi une révision du fonctionnement du siège de l’APHP dont l’efficience ne semble pas à la hauteur de l’augmentation des effectifs de 32% entre 2004 et 2008 ».
Comme en témoigne la grève actuelle des personnels à l’hôpital Ambroise Paré, les communiqués de l’intersyndicale de l’AP-HP , l’ensemble de la communauté hospitalière de l’AP-HP, médicale et non médicale, est décidée à ne pas laisser faire cette entreprise de démolition. Le MDHP annonce qu’une assemblée générale de l’ensemble des personnels médicaux de l’AP-HP est convoquée le 15 décembre prochain pour décider de modalités d’action supplémentaires. Enfin, le MDHP « en appelle à toutes les forces syndicales, politiques, associatives, et à l’ensemble de la population : ne laissez pas détruire votre l’hôpital public » !
Maïté Pinero
Infirmiers, soignants, cadres de l’hôpital Ambroise Paré de Boulogne-Billancourt sont en grève depuis le 23 novembre pour dénoncer le manque de personnel permanent, la saturation des urgences et les risques encourus par les patients.
Au sous effectif chronique que connaissent tous les hôpitaux de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris s’ajoute le fait que l’AP-HP a gelé 106 postes à Ambroise-Paré qui est en travaux depuis un an. Les services rouvrent mais les postes sont débloqués au compte-goutte.
Résultat après une journée de travail, il n’est pas rare qu’une infirmière enchaîne sur la nuit : « Il y a danger, on ne peut plus suivre physiquement » soulignent les syndicats CGT, CFDT, SUD et SNCH (cadres hospitaliers) qui dénoncent aussi le recours massif aux intérimaires envoyés dans les services sans en connaître le fonctionnement ce qui ajoute aux risques d’erreur.
Les syndicats ont demandé la fermeture de 50 cinquante lits et la direction a accepté d’en fermer 40.
Cette grève survient alors que la protestation monte contre les les premiers décrets d’application de la loi Bachelot et les mesures d’économies de l’AP-HP (l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris).
Ainsi, le professeur Coriat, qui préside à l’AP-HP la Commission médicale d’établissement (CME, instance représentative des médecins), a déclaré que lui-même et la plupart des médecins à postes à responsabilités démissionneraient si le projet de suppression de milliers d’emplois dans les prochaines années n’était pas revu.
Depuis l’annonce de sa décision il reçoit des dizaines de messages de ses collègues, présidents de CME, chefs de service, chefs de pôle, lui faisant part de leur soutien et de leur décision d’imiter sa décision.
Enfants et personnes âgées premières victimes
Pour leur part, le professeur Bensman et le professeur Lejonc ont déjà démissionné de leurs fonctions administratives.
Le premier, médecin à d’enfants Armand-Trousseau écrit dans sa lettre de démission que « les traitements et la sécurité des enfants dont beaucoup ont une maladie mortelle ne sont plus assurés dans de bonnes conditions. Des nourrissons ne sont pas changés et ne mangent pas à l’heure ».
Le professeur Lejonc, ex-responsable de pôle à l’hôpital Henri-Mondor, décrit dans sa lettre de démission la pénurie de moyens du département de gériatrie qui l’empêche de « maintenir des soins décents ».
En plein Paris, au sein de la prestigieuse AP-HP, l’hôpital Trousseau un des premiers pôles de pédiatrie hospitalo-universitaire français n’accueille plus correctement des nourrissons gravement malades tandis que le grand hôpital Henri-Mondor n’a plus les moyens d’assurer un accueil correct aux personnes âgées.
La pédiatrie et la gériatrie, assurées pour l’essentiel par le secteur public sont des secteurs déficitaires, « non rentables », pour « l’hôpital entreprise » et sous évalués par la tarification à l’activité (T2A).
Leur situation est révélatrice de la dérive du système de soins, de la destruction du service public hospitalier que la loi Bachelot est en train d’accélérer.
Intolérable, inouï, mais très révélateur du désastre sanitaire à venir, les plus fragiles, les enfants et les personnes âgées sont les premières victimes.
Maïté Pinero