Dépêche APM du 16 décembre 2009 : Suppressions d’emplois à l’AP-HP: des médecins menacent de faire grève

PARIS, 16 décembre 2009 (APM) – De nombreux médecins de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) ont voté, mardi soir lors d’une assemblée générale, le principe d’une grève en cas de suppressions d’emplois « sans justification médicale » en 2010.

Plus d’une centaine de médecins, dont des présidents de Comités consultatifs médicaux (CCM) et des représentants de syndicats de personnels médicaux et non médicaux, se sont réunis mardi en fin de journée dans un amphithéâtre de la faculté de médecine de l’hôpital Pitié-Salpêtrière, à l’appel du Mouvement de défense de l’hôpital public (MDHP).

Cette assemblée a été organisée « à la suite de l’initiative du président de la Commission médicale d’établissement (CME) de l’AP-HP, Pierre Coriat, de ne pas accepter de suppressions d’emplois sans justification et de menacer de démissionner si tel était le cas », a expliqué le Pr André Grimaldi, l’un des responsables du MDHP, en introduction.

Bernard Granger, autre responsable du mouvement, a précisé que la pétition témoignant d’un soutien « massif » à Pierre Coriat et faisant part de menaces de démission avait recueilli « 904 signatures dont celles de 31 présidents de CCM sur 37, de 118 chefs de pôle sur 175 et de 426 chefs de service ».

Lors de l’assemblée générale, les participants ont voté quasiment à l’unanimité une motion approuvant l’engagement du président et du vice-président de la CME, des présidents de CCM et des chefs de pôle à démissionner « si des emplois de soignants médicaux et non médicaux sont supprimés sans justification médicale ».

« Exige[ant] l’arrêt immédiat des rendus de postes médicaux et non médicaux réclamés à chaque hôpital sur des critères purement comptables » et « la suppression immédiate du plafonnement des emplois », les signataires ont approuvé le principe d’un dépôt de préavis de grève de 24 heures le jour de l’annonce de l’Etat des prévisions des recettes et des dépenses (EPRD) pour 2010, si celui-ci « implique des rendus d’emplois sans justification médicale ».

La motion prévoit qu’un cortège accompagnera ce jour-là au ministère de la santé les responsables médicaux qui remettront leur démission de leurs fonctions administratives.

La motion évoque l’accord de ses signataires pour les regroupements de structures à condition qu’ils permettent de « répondre aux besoins de la population », de « mettre en oeuvre un authentique projet médical (…) », de « maintenir le potentiel de recherche en relation avec les activités hospitalières du site », et d' »assurer des conditions de travail satisfaisantes pour le personnel médical et non médical ».

Les « réduction d’emplois ne peuvent être qu’une conséquence de ces regroupements », insiste le texte de la motion qui souligne également la nécessité de réaliser des « investissements à la hauteur des enjeux ».

Réexpliquant sa propre démarche, Pierre Coriat a indiqué qu’il prendrait sa décision de démissionner ou pas de ses fonctions de président de CME « fin janvier ou début février » 2010, c’est-à-dire lorsque les « tutelles » de l’AP-HP rendront leurs arbitrages au regard des projets de restructuration qui seront proposés auparavant par la communauté médicale et la CME.

Alors que les autorités de tutelle avaient prévu de supprimer 1.150 emplois médicaux et non médicaux en 2010, celles-ci ont accepté de revoir leur « méthodologie » et de ne pas effectuer de retraits d’emplois dans les hôpitaux « par saupoudrage technocratique » mais en fonction de projets de réorganisation, a rapporté le président de la CME.

Il a précisé que l’accord récent de la CME d’accepter la suppression de 51 postes médicaux en 2010 n’était que « préliminaire » (cf dépêche APM SNMLA001). La menace de démission concernant en effet également les suppressions d’emplois soignants non médicaux, y compris ceux de secrétaire médicale, la CME ne se positionnera définitivement qu’au vu de l’EPRD pour 2010, a assuré son président.

Lors de l’assemblée générale, les responsables des syndicats de médecins et de chirurgiens ont expliqué qu’ils soutenaient les efforts pour améliorer l’organisation de l’AP-HP à condition qu’ils n’aboutissent pas à une réduction de moyens.

Bernard Augereau, président du Syndicat des chirurgiens des hôpitaux, a cité plusieurs « exemples pratiques » de restructuration constituant un « reflet d’une logique purement comptable ».

Il a évoqué le cas du transfert du centre de greffes hépatiques de l’hôpital Cochin à l’hôpital Saint-Antoine qui s’est traduit selon lui par un perte de moyens avec le maintien d’une seule salle d’opération au lieu de deux et de dix lits contre 20 à Cochin.

PAUPERISATION DES SERVICES

Plusieurs présidents de CCM ont également pris la parole, tel le Pr Denis Devictor, président du CCM de l’hôpital Bicêtre (Val-de-Marne) qui a affirmé que les hôpitaux étaient « à l’agonie ».

« Nous constatons tous les jours les difficultés à faire tourner nos structures par manque de personnel », a-t-il expliqué.

« Nous sommes mobilisés pour réformer l’AP-HP », a assuré le Pr Laurent Brochard, président du CCM de l’hôpital Henri Mondor à Créteil. « Si nous menaçons de démissionner, c’est parce que la méthode est insupportable sur le terrain », a-t-il dénoncé.

Les restructurations entraînent actuellement une « paupérisation » des services, a déploré le Pr Erea Garabedian, président du CCM de l’hôpital Armand Trousseau. « 1+1 ne font pas deux mais font au mieux 1,5, voire 1,25 », a-t-il illustré en évoquant la « souffrance terrible » ressentie par le personnel.

Comme d’autres intervenants, le président du CCM de l’hôpital Armand Trousseau a également appelé à augmenter les investissements, soulignant que dans certains services, « la peinture tombe ».

« La casse du plus grand CHU de France aura des conséquences au plan universitaire, dans les domaines de l’enseignement et de la recherche », a affirmé un autre médecin.

Présent à l’assemblée générale qui a duré environ 1h30, le président du conseil d’administration de l’AP-HP, député socialiste de Paris, Jean-Marie Le Guen, a apporté son soutien aux participants estimant qu’ils avaient « raison de se mobiliser ».

Il a précisé que différents élus franciliens, de tous bords politiques, prenaient conscience de la situation et se montraient d’accord avec les demandes des médecins.

Il a ajouté qu’il avait demandé à l’association des maires d’Ile-de-France de se réunir en janvier pour se pencher sur l’évolution de l’AP-HP en prenant notamment connaissance du témoignage du président de la CME.

san/so/APM polsan

SOMLG002 16/12/2009 08:39 ACTU