Le directeur de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris détaille son plan d’économie. Il annonce qu’en cinq ans l’AP pourra gérer entre 2 000 et 4 000 accouchements supplémentaires.
Propos recueillis par Odile Plichon | 23.01.2010, 07h00
Vitrine des hôpitaux de France, l’AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris) poursuit sa mue à vitesse grand V. Dès 2008, le principe de regrouper les 37 établissements en 12 groupes de soins a été acté. Et le conseil exécutif vient d’approuver les premières orientations stratégiques pour les quinze ans à venir. Fermetures ici, regroupements là, ouvertures ailleurs… Ce vaste chambardement, qui passe par la suppression de 3 500 postes d’ici à 2012 et vise un retour à l’équilibre la même année, ne se fait pas sans heurts. Le directeur général de l’AP-HP, Benoît Leclercq, détaille en exclusivité son plan.
Combien restera-t-il d’hôpitaux à l’AP à l’issue de ce plan ?
Benoît Leclercq. Paris est, avec les Alpes-Maritimes, le département qui compte le plus d’établissements rapporté au nombre d’habitants. D’ici à 2020, nous pourrions réduire de quelques sites le nombre de nos hôpitaux. Je précise d’emblée que cette profonde réorganisation ne se fera pas contre les malades : partout, nous allons nous adapter à leurs besoins. Dans chacun des groupes créés, la population trouvera une offre complète et centralisée.
Pourquoi ne pas juste rénover les structures existantes ?
Du fait de la vétusté de certains locaux, moderniser en regroupant revient souvent moins cher que de rénover. A Paris, la seule mise aux normes de l’Hôtel-Dieu coûterait ainsi 280 millions d’euros, alors que la création de 450 nouveaux lits à Necker ne représente que 180 millions d’euros. Et puis, la médecine moderne ne se fait pas avec des hôpitaux éparpillés. Ainsi, au coeur de Paris, nous allons regrouper certains services de chirurgie de Cochin et de l’Hôtel-Dieu, distants de seulement 2,5 km. Nous allons également réunir l’ORL de Saint-Louis et de Lariboisière.
Ces regroupements se traduiront-ils par une baisse de l’offre de soins ?
Non, je m’y engage ! Grâce aux 450 millions d’euros que nous investirons chaque année pendant cinq ans, cette modernisation se traduira le plus souvent par une meilleure organisation de la prise en charge : d’ici à la fin 2010, les trois services qui s’occupent des grands brûlés seront regroupés sur Saint-Louis. Je précise que certains des services que nous allons regrouper ne tournaient pas au maximum de leurs capacités.
Des exemples ?
Aujourd’hui, le taux d’occupation moyen en chirurgie digestive varie de 59 % à 92 %, selon les endroits. En cardiologie, il fluctue de 59 % à 92 %. Les marges de progrès sont donc réelles.
L’annonce de la suppression de 3 500 postes d’ici à 2012 a soulevé un tollé…
Pour maintenir nos équilibres économiques, nous devons développer notre activité et mieux maîtriser nos coûts, entre 90 et 100 millions d’euros par an d’ici à 2012 ; 70 % de notre budget correspondant à de la masse salariale, nous devons effectivement supprimer entre 3 000 et 4 000 postes sur un total de 92 000. La moitié environ concernera les soignants et les médecins, l’autre moitié le personnel administratif. Mais, je le répète, du fait des réorganisations prévues, les malades n’en pâtiront pas.
L’annonce de fermetures de maternités a aussi fait bondir…
Mais nous accueillerons de plus en plus de futures mamans ! Dans l’Est parisien, nous disposons de 5 maternités : Robert-Debré, Tenon, Saint-Antoine, La Pitié, Trousseau. A Trousseau, la maternité ouverte en 2007 continue de monter en puissance. Et celle du Kremlin-Bicêtre, qui vient d’ouvrir, réalisera d’ici peu 3 500 accouchements par an : nous ouvrons de nouvelles structures en banlieue, là où les familles s’installent. La nouvelle maternité de Cochin qui ouvrira fin 2010 (regroupement de Port-Royal et de Saint-Vincent-de-Paul) pourrait permettre 6 000 accouchements par an. En cinq ans, l’offre en périnatalité pourrait progresser de 5 % à 10 % à l’AP. Soit entre 2 000 et 4 000 accouchements de plus.
Annoncer un déficit zéro en 2012 pour les hôpitaux a-t-il un sens ?
L’AP-HP bénéficie d’un budget de 6,4 milliards d’euros par an, ce qui représente 10 % du budget national des hôpitaux publics pour soigner 1 million de patients chaque année. Si la réorganisation en cours permet de revenir progressivement à l’équilibre, tout en améliorant l’offre de soins, il me semble que ce serait éthique.
Quel patrimoine allez-vous céder ?
Ces dernières années, nous avons déjà vendu le Théâtre Mogador, un Holiday Inn à Paris, une station-service. En 2009, nous avons encore cédé le grand hôtel Lafayette et le Monte-Carlo (3,7 millions d’euros) et des terres agricoles dans l’Eure (580 000 €). Nous sommes en train de vendre l’hôpital Debrousse à Lyon. Nous entamons des discussions avec le Ville de Paris sur le devenir de Saint-Vincent-de-Paul qui sera prochainement libéré.