Ce dernier y réaffirmait son attachement à la prévention de la délinquance juvénile, qui demeure en effet, pour le chef de l’Etat, « un phénomène préoccupant » avec « plus 370 000 mineurs suivis chaque année par la justice, dans le cadre de l’assistance éducative ou d’une mesure pénale, sans que rien ne vienne faire baisser ce chiffre ». Un rendez-vous critiqué
Le rendez-vous du 14 octobre était cependant déjà contesté, avant d’avoir eu lieu, par plusieurs organisations syndicales de professionnels de la justice des mineurs (SNPES-PJJ-FSU, Syndicat de la magistrature, SAF, CGT-PJJ et AFMJF) qui se sont étonnées, dans un communiqué commun publié la veille, « que l’intitulé de cette journée soit à nouveau une stigmatisation de la jeunesse, alors que la part des mineurs dans la délinquance reste stable à 18 % ». Et de rappeler que « la première prévention de la délinquance des mineurs consiste d’abord à intervenir rapidement et de manière adaptée auprès des familles en difficulté et des enfants en danger », à l’inverse de « l’obsession du pénal » qui préside, selon elles, aux orientations du gouvernement en la matière. « L’obsession du pénal »
Les cinq organisations professionnelles s’inquiétaient ainsi, dans ce texte, des menaces pesant sur « l’intervention judiciaire en matière de protection de l’enfance », à travers la réduction du temps disponible des magistrats pour le traitement et les convocations de l’enfance en danger au profit du pénal, du recentrage des missions de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) toujours sur le pénal, au détriment de ses actions éducatives, ou encore de l’abandon des mesures de protection bénéficiant aux jeunes majeurs.
Elles dénonçaient enfin une « opération de communication ne correspondant à aucune volonté politique réelle d’agir pour la prévention », dans un contexte de baisse générale des moyens financiers accordés au secteur. Des idées reçues bien vivaces
De tout cela, il n’a pourtant pas été question au début de ces assises, qui ont surtout démontré la difficulté, pour les membres du gouvernement présents, comme pour les élus locaux et les magistrats invités à participer à la première table ronde – qui portait sur la question de l’autorité parentale, avec l’ambition de « Remettre tous les parents en capacité d’exercer leur autorité » – de dépasser les idées reçues, en l’absence d’ailleurs d’échange entre les intervenants ou avec la salle, dont les acteurs de terrain semblaient curieusement absents.
C’est ainsi que l’évolution de la cellule familiale – et en particulier l’augmentation du nombre des familles monoparentales – et l’origine étrangère des parents ont été abondamment citées pour expliquer les difficultés rencontrées dans l’exercice de leur autorité sur leurs enfants, sans que l’on perçoive d’ailleurs toujours très bien, au cours des différentes interventions, s’il était question de carences éducatives ou de faits de délinquance. Une synthèse acrobatique
La secrétaire d’Etat chargée de la famille et de la solidarité, Nadine Morano, a fini par opérer une synthèse quelque peu acrobatique en affirmant que « 50 % des cas de délinquance juvénile étaient dus à des carences éducatives ». Tout en expliquant, en substance, combien il était difficile pour les parents issus de cultures différentes d’exercer leur autorité sans toujours bien maîtriser les codes de la société française.
L’élue de Meurthe-et-Moselle a également regretté que les équipes municipales ne se soient pas plus emparées des outils mis à leur disposition par la loi du 5 mars 2007 de prévention de la délinquance, et en particulier des conseils des droits et devoirs des familles (CDDF), le maire étant « le mieux placé pour repérer les familles en difficulté et les enfants qui traînent dans les rues ». La loi de 2007 difficile à appliquer
Mais le texte de 2007 semble difficile d’application pour de nombreux édiles, à en croire le député-maire de Châteaurenard (Bouches-du-Rhône), Bernard Reynès, venu témoigner de la mission menée sur ce sujet, pour le compte du gouvernement, avec une dizaine d’autres premiers magistrats de toutes tendances politiques, et qui a débouché sur l’expérimentation d’une « cellule de citoyenneté et de tranquillité publique » plus facile à mettre en oeuvre, a-t-il expliqué.
Composée du maire, du procureur de la République, de représentants des forces de l’ordre (police ou gendarmerie), de travailleurs sociaux et de membres de l’Education nationale, elle s’adresse à tous les publics mais l’expérience montre que la grande majorité des personnes concernées sont des jeunes, qui peuvent se voir infliger une amende ou un travail d’intérêt général, a-t-il encore indiqué. Des initiatives de soutien à la parentalité
D’autres initiatives de soutien à la parentalité ont aussi été décrites, comme les « stages parentaux » de restauration de l’autorité parentale mis en oeuvre à Paris depuis un an par Jean-Claude Marin, procureur de la République près le tribunal de grande instance, ou encore les « ateliers parents » lancés dès 1999 dans la ville flamande d’Halluin (Nord), à la frontière franco-belge, dont le maire Jean-Luc Deroo, est également venu vanter les mérites.
Seul à tenter d’apporter quelques éléments de contexte, le président du tribunal pour enfants de Bobigny et de l’association Défense des enfants International-France (DEI-France), Jean-Pierre Rosenczveig, a rappelé la marginalité de la délinquance des mineurs et souligné que la grande majorité des jeunes concernés par la justice l’étaient en tant que victimes, seuls 60 000 d’entre eux l’étant pour des faits de délinquance. Montrer l’autorité parentale comme légitime
Quant au débat sur la condition parentale, il devrait non seulement être replacé au coeur d’une discussion plus large sur la politique familiale dans son ensemble, a défendu le président de DEI France, mais avoir en outre pour finalité de faire apparaître « l’autorité parentale comme légitime ».
Absent enfin de cette réunion au Palais de justice, le député (UMP) des Alpes-Maritimes Eric Ciotti, auteur de la proposition de loi controversée renforçant les modalités de suspension des allocations familiales en cas d’absentéisme scolaire, est cependant intervenu par le biais d’une vidéo enregistrée, où il avance l’idée, prochainement soumise au Parlement, de créer une « ordonnance de probation », délivrée par le procureur de la République à l’encontre de jeunes auteurs de faits délictueux, et « dont le suivi serait de la responsabilité des parents ». ACTUALITES SOCIALES HEBDOMADAIRES – site internet – 14 octobre 2010.