Dépêche APM du 20 décembre 2011 : Hôpital: la Cour des comptes demande une mission de service public « psychiatrie de secteur »

PARIS, 20 décembre 2011 (APM) – La Cour des comptes a demandé mardi, dans son rapport d’évaluation du Plan psychiatrie et santé mentale (PPSM) 2005-10, la création d’une mission de service public « psychiatrie de secteur ».

Le ministère de la santé a donné son accord sur cette orientation dans sa réponse à la Cour des comptes, a souligné mardi le premier président, Didier Migaud.

L’objectif est de « préserver les acquis de la sectorisation » et de donner « un cadre juridique cohérent spécifique à la psychiatrie » car « la Cour est convaincue qu’il existe une spécificité de l’offre de soins en psychiatrie par rapport aux autres disciplines médicales, compte tenu du caractère désocialisant des pathologies ».

Le rapport de la Cour des comptes dresse un bilan du PPSM 2005-10 en complément de celui du Haut conseil de la santé publique (HCSP) portant sur l’impact en matière de santé publique (cf APM HMOLJ004).

La Cour des comptes fait le constat de la fragilisation progressive de l’organisation territoriale de la psychiatrie, à travers « une stratégie ministérielle de mise en déshérence de la sectorisation », selon l’expression de Didier Migaud.

Le cadre juridique est progressivement devenu « incohérent » avec l’abrogation en juillet 2005 du décret du 14 mars 1986 distinguant les secteurs (psychiatrie générale, infanto-juvénile, pénitentiaire) et la suppression du secteur comme unité territoriale par l’ordonnance de janvier 2010.

Au final, « aucun texte ne détaille aujourd’hui l’ensemble des modalités d’implantation et de fonctionnement spécifiques à l’activité psychiatrique », mais le secteur reste la référence d’organisation sur le terrain, souligne le rapport.

La Cour des comptes demande « la levée de ces ambiguïtés » pour « redonner un cadre d’exercice stable et clair aux professionnels » et un système lisible pour les patients et leur famille.

La mission de service public sur la psychiatrie de secteur (qui serait la quinzième mission des établissements de santé) pourrait « reprendre l’essentiel des fonctions actuellement assumées par le secteur » avec l’objectif de « favoriser les diagnostics précoces, d’éviter les ruptures de soins et d’assurer la réinsertion sociale des patients résidant sur un territoire ».

Elle s’appuierait sur un contrat fixant les obligations de chacun. La définition des conditions d’autorisation de la psychiatrie pourrait être définie par voie réglementaire.

Les magistrats estiment que la nouvelle organisation territoriale devra « voir progressivement son centre de gravité situé en ville et non dans les structures d’hospitalisation complète ».

Au passage, la Cour demande au ministère de donner une « assise stable » à la Mission nationale d’appui en santé mentale (MNASM) dont les interventions sont « d’utiles outils de diagnostic et d’aide à la gestion des changements ». Elle souhaite que les personnels soient détachés et non mis à disposition. Le ministère s’est engagé à revoir son statut.

REEQUILIBRAGE ENTRE REGIONS ET VERS L’AMBULATOIRE

La Cour des comptes incite également le ministère à une amplification « vigoureuse » du rééquilibrage des moyens entre régions mais aussi de l’intra-hospitalier vers les alternatives à l’hospitalisation, le médico-social et la prévention, car le PPSM 2005-10 n’a pas eu l’effet annoncé.

Les disparités régionales en termes d’équipement (centres médico-psychologiques et lits) et en densité de psychiatres restent très marquées. La saturation des lits, pourtant nombreux, se poursuit mobilisant « un nombre important de professionnels, ce qui limite les moyens affectés non seulement à l’extrahospitalier en aval, mais aussi à la prévention ».

Les moyens dégagés par la réduction du nombre de lits (-4.500 lits entre 2000 et 2009) n’ont pas été entièrement reconvertis vers les alternatives (+2.000 places d’hospitalisation à temps partiel, +500 places d’accueil familial thérapeutique, +910 places d’hospitalisation à domicile mais -500 places en appartements thérapeutiques). La Cour constate même que la dynamique de réduction du nombre de lits s’est ralentie depuis l’entrée en vigueur du plan.

Par ailleurs, la prise en charge médico-sociale est « en inégal développement » selon les régions. Mais la Cour des comptes indique manquer de données sur ce point.

Le rééquilibrage devra se faire par redéploiement des moyens de l’hospitalisation complète vers la prévention et les alternatives. La Cour recommande aussi « une évolution des modalités d’organisation et de gestion interne des établissements pour mieux distinguer les moyens intra- et extrahospitaliers et de renforcer les seconds ».

RE FO RME DU FINANCEMENT

Le troisième chantier prioritaire sera la réforme du financement de la psychiatrie, car la dotation globale en vigueur freine la réorientation des prises en charge.

La Cour constate les retards pris dans l’élaboration de la valorisation de l’activité en psychiatrie (VAP), le changement étant « désormais prévu en 2015 ». Les données du recueil d’informations médicalisées en psychiatrie (RIM-P) sont « valablement expertisées » depuis 2011 mais ses insuffisances actuelles ne permettent pas d’établir des constats solides.

hm/so/APM polsan

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HMOLJ006 20/12/2011 12:35 ACTU