« Etre là » : film documentaire français sur la vie en prison de Regis Sauder

La critique de Premiere

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Bernard Achour : Loin de la neutralité plastique adoptée par la plupart des documentaires, cette plongée dans le quotidien du personnel soignant féminin (psychiatres, infirmières, ergothérapeutes) de la prison des Baumettes, à Marseille, affiche au contraire la volonté d’être un « spectacle » audiovisuel où cadrages, effets de montage et autres embardées sonores harponnent sans cesse l’attention. D’abord éconcertant, voire ambigu, le procédé opère à l’arrivée une fusion magnifique avec le chaos ambiant et génère une empathie particulièrement profonde, aussi admirative que terrifiée.

La critique du Monde culture

http://www.lemonde.fr/culture/article/2012/11/06/etre-la-un-documentaire-juste-et-sensible-sur-la-vie-en-prison_1785973_3246.html

En 2011, son documentaire Nous Princesses de Clèves avait fait sensation. Régis Sauder s’était installé dans un lycée des quartiers nord de Marseille. Il avait imaginé un dispositif qui faisait résonner les problématiques intimes des lycéens avec celles des personnages du roman de Madame de Staël, La Princesse de Clèves, qu’ils étudiaient en cours de français cette année-là.

Être là se passe aussi dans une institution marseillaise, à la prison des Baumettes, dans l’espace réservé à l’aide psychique aux détenus. Le dispositif, une fois encore, est fort, imposé par le règlement des prisons françaises qui interdit de montrer les visages des prisonniers. On n’entendra donc que leurs voix, enregistrées lors de rendez-vous avec le personnel soignant – des psychiatres, infirmières, ergothérapeutes, toutes des femmes, toutes volontaires pour exercer leur métier au sein de la prison.

C’est sur ces femmes qui opposent à la logique écrasante de l’institution leur écoute, leur patience, leur engagement opiniâtre que Régis Sauder braque sa caméra. Sur leurs visages vient s’inscrire la souffrance, la tension, la violence dont témoigne la parole des patients. Une belle manière de suggérer qu’elles aussi subissent la brutalité de la prison, en venant chaque jour y travailler au nom de leurs convictions.

Quitte à y laisser une part d’elles-mêmes, comme elles en témoignent dans les séquences où le réalisateur leur donne la parole. Quitte à s’avouer vaincues aussi, parfois. En confrontant leur parole à celle des détenus, le film interroge avec justesse le rapport entre l’individu, la société et la prison. Il aurait pu se passer du travail sonore sophistiqué, mais un peu redondant, qui vient suggérer l’oppression du milieu carcéral.
– Sur le Web : www.shellac-altern.org/fiches-films/310-etre-la-.