Intervention du Collectif des 39 lors de l’audition au Sénat le 9 septembre 2013
Dès 2010 nous nous sommes opposés au projet de révision de la loi de 1990
Notamment en ce qui concernait le projet liberticide des soins ambulatoires sous contrainte.
Certes, certaines dérives du régime des sorties d’essai posaient question. C’est la raison pour laquelle, certaines associations d’usagers étaient favorable à la révision de la loi de 1990.
Mais cela ne justifiait pas l’instauration de cette extension liberticide de l’internement.
Je rappelle qu’en 2011, l’ensemble des parlementaires de gauche se sont opposés à ce projet en le qualifiant expressément de « sécuritaire » et de « liberticide ».
D’autant que cette forme de contrainte, non seulement échappe au contrôle du JLD, mais en plus entraîne chez les soignants une banalisation de l’internement – fut-il à domicile.
Nous parlons d’internement, parce qu’il s’agit bien d’une mesure de droit d’exception entraînant une privation de certains droits fondamentaux, qui ne dit plus son nom.
Etant donné que les sorties et permissions d’essai sont réintroduites dans le projet actuel, et de ce fait soumises au contrôle du JLD, nous considérons qu’il n’y a plus lieu de maintenir les soins ambulatoires sous contraintes. C’est pourquoi nous proposons leur abrogation.
Ce qui remettrai l’accent sur le caractère d’exception de ces mesures.
Au-delà se pose la question plus globale des enjeux politiques de la psychiatrie.
Certes, les politiques n’ont pas à définir les bonnes pratiques en psychiatrie. Mais la définition des missions et du soin en psychiatrie les concerne.
La psychiatrie n’aurait-elle pour mission que de traiter des troubles et des symptômes (comme le préconisaient les rapports Cléry Mélin en 2003 et Couty en 2009), ou de normaliser et contrôler les populations ?
La psychiatrie n’a-t-elle pas, avant tout, à soulager la souffrance d’un sujet ? Ce qui implique une clinique qui repose sur la relation et la confiance. Ce qui se construit avec la personne.
Or la banalisation de la contrainte vient structurer une culture soignante, ou ce n’est plus au soignant de faire l’effort d’aller vers le patient et d’établir un lien thérapeutique de confiance. Puisque le patient est obligé de venir. Les soignants considérant dans ce cas là que cela suffit !
Maintenir les soins ambulatoires sous contrainte et leur banalisation revient donc à définir la psychiatrie avant tout comme outil de contrôle et non comme système de soins chargé de soulager la souffrance de nos concitoyens.
Nous récusons cette conception et c’est pourquoi nous insistons sur la nécessité de l’instauration d’une grande loi sanitaire rédéfinissant les missions humanistes de la psychiatrie.