CRPA –Cercle de Réflexion et de Proposition d’Actions sur la psychiatrie Association régie par la loi du 1er juillet 1901 | Ref. n° : W751208044 Président : André Bitton. 14, rue des Tapisseries, 75017, Paris | Tél. : 01 47 63 05 62 Mail : crpa@crpa.asso.fr | Site internet : http://crpa.asso.fr Texte déposé à la Direction régionale de la santé (DGS) lors de la rencontre du 13 mars 2018 Par Yaël Frydman – Secrétaire générale du CRPA. Paris, le 12 mars 2018. A l’occasion de cette rencontre, je voudrais faire connaître mon désarroi face à ce que j’estime être un cruel manque de prise de décisions et d’actions de la part des pouvoirs publics concernant les dysfonctionnements de la psychiatrie. Le bilan est de notoriété publique, la santé mentale qui coûte 107 milliards d’euros de coûts induits et 27 milliards de coûts directs, soit 134 milliards d’euros, est l’un des budgets les plus conséquents de la santé. Pour autant la situation de la psychiatrie publique est aujourd’hui plus que critique, elle est catastrophique et il n’y a aucune perspective sérieuse d’amélioration. Conditions de travail des soignants Quasiment un hôpital psychiatrique sur deux est en grève pour dénoncer des conditions de travail impossibles liées à un fonctionnement managérial du système de santé. Maltraitance Le CGLPL épingle régulièrement des hôpitaux psychiatriques pour des pratiques d’un autre âge et des soignants tirent la sonnette d’alarme sur le fait qu’ils ont conscience que leurs conditions de travail les obligent à devenir maltraitants. Croissance continue des soins sans consentement, cela sans compter le chiffre noir des personnes en service libre qui connaissent des mesures de contrainte. Par ailleurs, il n’y a toujours pas de lisibilité sur les programmes de soins dont leur durée. Pauvreté des propositions de soins L’essentiel des traitements psychiatriques est réduit à la prise de neuroleptiques, or ces médicaments ne guérissent pas, ils sont au mieux une béquille et au pire une camisole chimique, quand ce n’est pas la cause de décès. Le choix de la psychiatrie biologique, du tout médicament, est une aberration qui fait fi des raisons psycho-sociales qui peuvent perturber une vie, des ressources des personnes elles-mêmes, de l’importance de l’interaction sociale dans le mieux-être et des formes non-agressives de soins. Fermeture des lits et des centres de proximité La sectorisation s’est malheureusement révélée être un échec étant donné le sous-développement des structures de proximité. Nous nous rapprochons de la politique psychiatrique des Etats-Unis où les personnes sont hospitalisées 3 jours et mises dehors. Mais au bout de 3 jours si vous êtes mal et qu’il n’y a pas de structures annexes pour vous appuyer vous irez encore plus mal jusqu’au risque de passages à l’acte critiques. Non-respect structurel des droits des usagers D’une part, la loi du 5 juillet 2011 modifiée le 27 septembre 2013 a toujours du mal à rentrer dans les mœurs, elle encore très souvent détournée ou obstruée : absence de notification des droits, empêchement d’assister à l’audience du JLD. D’autre part, les patients hospitalisés connaissent dans les lieux des pressions et humiliations quotidiennes sur leurs droits, qui relèvent de pratiques coutumières et qui sont complètement banalisées. Elles sont très bien décrites par l’ex-infirmier Philippe Clément ainsi que par la chercheuse Pauline Rhenther. Création d’un monopole des représentants d’usagers Bien que vous nous ayez fait part du constat du manque d’associations et de représentants d’usagers dans le milieu psychiatrique, votre ministère a décidé de la création d’une association fédératrice et porte-voix pour l’essentiel des associations agréées nationalement toutes disciplines médicales confondues, qui deviendrait son interlocuteur privilégiée. France Assos Santé, avec à sa tête le chef d’entreprise Alain-Michel Ceretti, est le résultat d’une volonté politique de créer un monopole de représentations des usagers en santé qui écrase encore plus qu’elles ne le sont déjà les petites associations d’usagers. Dans l’intérêt de tous, il serait temps que les pouvoirs publics prennent conscience de l’échec de leur politique psychiatrique depuis les années 1990, et prennent des positions claires qui peuvent-être très simples, dans la perspective de créer un appel d’air. La logique de rationalisation ne fait qu’accroitre les problèmes et son pendant dans les recommandations de bonnes pratiques ne peut pas être satisfaisant. Puisqu’il est prévu que 25 % de la population sera tôt ou tard sujette à des troubles psychiques, c’est la conception et la politique d’un rétablissement du trouble psychique qui est à penser. Le raisonnement est simple : une personne chronicisée dans son mal être coûte cher et mobilise des acteurs. Faire en sorte que les prises en charge soient efficaces est dès lors une question prioritaire. Par ailleurs, il serait impératif de mettre en place une politique de dé-psychiatrisation et de dé-chronicisation. Je vous rappelle certaines des propositions du CRPA dans ce sens : Carte de soins L’offre de soins doit pouvoir être diversifiée afin qu’outre les médicaments un panel de soins puisse être proposé aux usagers de la psychiatrie publique. Sachant qu’un grand nombre de patients sont en situation de précarité sociale, et qu’ils se retrouvent exclus des bénéfices de soins et de thérapies qui ont cours dans le privé et qui ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale. Politique d’évitement de l’internement psychiatrique Dans les cas de crise, de nombreuses hospitalisations pourraient évitées en mettant en place un dispositif d’écoute de la personne. Plutôt que d’hospitaliser immédiatement, il s’agirait de donner la possibilité à la personne de se calmer et d’échanger sur ses difficultés en la prenant quelques heures à part dans un espace calme et apaisant. Tous les états de crise ne sont pas liés à des troubles psychiatriques, ils ont souvent pour cause des conflits ou des situations qui ne légitiment pas une psychiatrisation. Intransigeance sur la maltraitance et le non-respect des droits des usagers Les soignants qui y dérogent doivent pouvoir être sanctionnés. Pour l’heure aucun médecin responsable de la mort d’un patient pour cause de surmédication, défaut de surveillance ou autre, n’a pu être condamné. Des hôpitaux qui portent la responsabilité des actes psychiatriques ont été condamnés en juridiction administrative pour de tels fait, mais jamais au pénal ce qui est scandaleux. Ouverture de la représentation des usagers Outre France Assos Santé, les pouvoirs publics continuent d’avoir pour interlocuteurs privilégiés l’Unafam et la Fnapsy. Or l’Unafam, bien qu’elle occupe à ce jour la plupart des postes de représentants d’usagers, est statutairement une association des familles et de proches des usagers. La représentation des usagers ne peut plus décemment être tenue par les familles ! Quant à la Fnapsy, bien qu’elle ait été complètement discréditée, elle continue à être appelée comme relai crédible par les pouvoirs publics. Le CRPA, bien qu’agréé, s’est vu de son côté refuser toute participation aux CLSM et instances auxquels il s’est proposé, pour des motifs que nous contestons, et sans que votre ministère manifeste son soutien en vue d’une nécessaire ouverture du paysage de la représentation des usagers. Plutôt que de perdurer dans une situation coûteuse, inefficace et de plus en plus violente qui risque de vous mettre tout le monde à dos, je pense qu’il serait plus judicieux de prendre le risque de vous mettre certains acteurs du terrain psychiatrie – santé mentale à dos, en reconsidérant vos axes politiques et les messages que vous adressez aux acteurs du terrain dans leur ensemble.
Qu’en est-il de la politique psychiatrique du ministère de la santé ?
Ci-dessous le texte déposé par Mme Yaël Frydman, secrétaire générale du CRPA lors de leur rendez-vous avec les représentants du Bureau de la santé mentale de la DGS, au ministère de la santé, le 13 mars 2018. « Lors de ce rendez-vous nous n’avons guère été qu’écoutés mais pas entendus. Ce constat est important puisqu’il recoupe celui fait par d’autres organisations que la nôtre et qu’il conforte la nécessité des luttes sur ce terrain. »
Cet article est publié sur notre site internet à l’adresse suivante : http://psychiatrie.crpa.asso.fr/669
Il est également publié sur l’édition participative de Mediapart Les contes de la folie ordinaire, et apparaît aujourd’hui à la Une de Mediapart, dans la colonne Club à droite de la une : cliquer sur ce lien
André Bitton pour le CRPA (cercle de réflexion et de proposition d’actions sur la psychiatrie), 14 rue des Tapisseries, 75017,Paris, tél. 01 47 63 05 62, site internet :http://crpa.asso.fr
CRPA –Cercle de Réflexion et de Proposition d’Actions sur la psychiatrie Association régie par la loi du 1er juillet 1901 | Ref. n° : W751208044 Président : André Bitton. 14, rue des Tapisseries, 75017, Paris | Tél. : 01 47 63 05 62 Mail : crpa@crpa.asso.fr | Site internet : http://crpa.asso.fr Texte déposé à la Direction régionale de la santé (DGS) lors de la rencontre du 13 mars 2018 Par Yaël Frydman – Secrétaire générale du CRPA. Paris, le 12 mars 2018. A l’occasion de cette rencontre, je voudrais faire connaître mon désarroi face à ce que j’estime être un cruel manque de prise de décisions et d’actions de la part des pouvoirs publics concernant les dysfonctionnements de la psychiatrie. Le bilan est de notoriété publique, la santé mentale qui coûte 107 milliards d’euros de coûts induits et 27 milliards de coûts directs, soit 134 milliards d’euros, est l’un des budgets les plus conséquents de la santé. Pour autant la situation de la psychiatrie publique est aujourd’hui plus que critique, elle est catastrophique et il n’y a aucune perspective sérieuse d’amélioration. Conditions de travail des soignants Quasiment un hôpital psychiatrique sur deux est en grève pour dénoncer des conditions de travail impossibles liées à un fonctionnement managérial du système de santé. Maltraitance Le CGLPL épingle régulièrement des hôpitaux psychiatriques pour des pratiques d’un autre âge et des soignants tirent la sonnette d’alarme sur le fait qu’ils ont conscience que leurs conditions de travail les obligent à devenir maltraitants. Croissance continue des soins sans consentement, cela sans compter le chiffre noir des personnes en service libre qui connaissent des mesures de contrainte. Par ailleurs, il n’y a toujours pas de lisibilité sur les programmes de soins dont leur durée. Pauvreté des propositions de soins L’essentiel des traitements psychiatriques est réduit à la prise de neuroleptiques, or ces médicaments ne guérissent pas, ils sont au mieux une béquille et au pire une camisole chimique, quand ce n’est pas la cause de décès. Le choix de la psychiatrie biologique, du tout médicament, est une aberration qui fait fi des raisons psycho-sociales qui peuvent perturber une vie, des ressources des personnes elles-mêmes, de l’importance de l’interaction sociale dans le mieux-être et des formes non-agressives de soins. Fermeture des lits et des centres de proximité La sectorisation s’est malheureusement révélée être un échec étant donné le sous-développement des structures de proximité. Nous nous rapprochons de la politique psychiatrique des Etats-Unis où les personnes sont hospitalisées 3 jours et mises dehors. Mais au bout de 3 jours si vous êtes mal et qu’il n’y a pas de structures annexes pour vous appuyer vous irez encore plus mal jusqu’au risque de passages à l’acte critiques. Non-respect structurel des droits des usagers D’une part, la loi du 5 juillet 2011 modifiée le 27 septembre 2013 a toujours du mal à rentrer dans les mœurs, elle encore très souvent détournée ou obstruée : absence de notification des droits, empêchement d’assister à l’audience du JLD. D’autre part, les patients hospitalisés connaissent dans les lieux des pressions et humiliations quotidiennes sur leurs droits, qui relèvent de pratiques coutumières et qui sont complètement banalisées. Elles sont très bien décrites par l’ex-infirmier Philippe Clément ainsi que par la chercheuse Pauline Rhenther. Création d’un monopole des représentants d’usagers Bien que vous nous ayez fait part du constat du manque d’associations et de représentants d’usagers dans le milieu psychiatrique, votre ministère a décidé de la création d’une association fédératrice et porte-voix pour l’essentiel des associations agréées nationalement toutes disciplines médicales confondues, qui deviendrait son interlocuteur privilégiée. France Assos Santé, avec à sa tête le chef d’entreprise Alain-Michel Ceretti, est le résultat d’une volonté politique de créer un monopole de représentations des usagers en santé qui écrase encore plus qu’elles ne le sont déjà les petites associations d’usagers. Dans l’intérêt de tous, il serait temps que les pouvoirs publics prennent conscience de l’échec de leur politique psychiatrique depuis les années 1990, et prennent des positions claires qui peuvent-être très simples, dans la perspective de créer un appel d’air. La logique de rationalisation ne fait qu’accroitre les problèmes et son pendant dans les recommandations de bonnes pratiques ne peut pas être satisfaisant. Puisqu’il est prévu que 25 % de la population sera tôt ou tard sujette à des troubles psychiques, c’est la conception et la politique d’un rétablissement du trouble psychique qui est à penser. Le raisonnement est simple : une personne chronicisée dans son mal être coûte cher et mobilise des acteurs. Faire en sorte que les prises en charge soient efficaces est dès lors une question prioritaire. Par ailleurs, il serait impératif de mettre en place une politique de dé-psychiatrisation et de dé-chronicisation. Je vous rappelle certaines des propositions du CRPA dans ce sens : Carte de soins L’offre de soins doit pouvoir être diversifiée afin qu’outre les médicaments un panel de soins puisse être proposé aux usagers de la psychiatrie publique. Sachant qu’un grand nombre de patients sont en situation de précarité sociale, et qu’ils se retrouvent exclus des bénéfices de soins et de thérapies qui ont cours dans le privé et qui ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale. Politique d’évitement de l’internement psychiatrique Dans les cas de crise, de nombreuses hospitalisations pourraient évitées en mettant en place un dispositif d’écoute de la personne. Plutôt que d’hospitaliser immédiatement, il s’agirait de donner la possibilité à la personne de se calmer et d’échanger sur ses difficultés en la prenant quelques heures à part dans un espace calme et apaisant. Tous les états de crise ne sont pas liés à des troubles psychiatriques, ils ont souvent pour cause des conflits ou des situations qui ne légitiment pas une psychiatrisation. Intransigeance sur la maltraitance et le non-respect des droits des usagers Les soignants qui y dérogent doivent pouvoir être sanctionnés. Pour l’heure aucun médecin responsable de la mort d’un patient pour cause de surmédication, défaut de surveillance ou autre, n’a pu être condamné. Des hôpitaux qui portent la responsabilité des actes psychiatriques ont été condamnés en juridiction administrative pour de tels fait, mais jamais au pénal ce qui est scandaleux. Ouverture de la représentation des usagers Outre France Assos Santé, les pouvoirs publics continuent d’avoir pour interlocuteurs privilégiés l’Unafam et la Fnapsy. Or l’Unafam, bien qu’elle occupe à ce jour la plupart des postes de représentants d’usagers, est statutairement une association des familles et de proches des usagers. La représentation des usagers ne peut plus décemment être tenue par les familles ! Quant à la Fnapsy, bien qu’elle ait été complètement discréditée, elle continue à être appelée comme relai crédible par les pouvoirs publics. Le CRPA, bien qu’agréé, s’est vu de son côté refuser toute participation aux CLSM et instances auxquels il s’est proposé, pour des motifs que nous contestons, et sans que votre ministère manifeste son soutien en vue d’une nécessaire ouverture du paysage de la représentation des usagers. Plutôt que de perdurer dans une situation coûteuse, inefficace et de plus en plus violente qui risque de vous mettre tout le monde à dos, je pense qu’il serait plus judicieux de prendre le risque de vous mettre certains acteurs du terrain psychiatrie – santé mentale à dos, en reconsidérant vos axes politiques et les messages que vous adressez aux acteurs du terrain dans leur ensemble.
CRPA –Cercle de Réflexion et de Proposition d’Actions sur la psychiatrie Association régie par la loi du 1er juillet 1901 | Ref. n° : W751208044 Président : André Bitton. 14, rue des Tapisseries, 75017, Paris | Tél. : 01 47 63 05 62 Mail : crpa@crpa.asso.fr | Site internet : http://crpa.asso.fr Texte déposé à la Direction régionale de la santé (DGS) lors de la rencontre du 13 mars 2018 Par Yaël Frydman – Secrétaire générale du CRPA. Paris, le 12 mars 2018. A l’occasion de cette rencontre, je voudrais faire connaître mon désarroi face à ce que j’estime être un cruel manque de prise de décisions et d’actions de la part des pouvoirs publics concernant les dysfonctionnements de la psychiatrie. Le bilan est de notoriété publique, la santé mentale qui coûte 107 milliards d’euros de coûts induits et 27 milliards de coûts directs, soit 134 milliards d’euros, est l’un des budgets les plus conséquents de la santé. Pour autant la situation de la psychiatrie publique est aujourd’hui plus que critique, elle est catastrophique et il n’y a aucune perspective sérieuse d’amélioration. Conditions de travail des soignants Quasiment un hôpital psychiatrique sur deux est en grève pour dénoncer des conditions de travail impossibles liées à un fonctionnement managérial du système de santé. Maltraitance Le CGLPL épingle régulièrement des hôpitaux psychiatriques pour des pratiques d’un autre âge et des soignants tirent la sonnette d’alarme sur le fait qu’ils ont conscience que leurs conditions de travail les obligent à devenir maltraitants. Croissance continue des soins sans consentement, cela sans compter le chiffre noir des personnes en service libre qui connaissent des mesures de contrainte. Par ailleurs, il n’y a toujours pas de lisibilité sur les programmes de soins dont leur durée. Pauvreté des propositions de soins L’essentiel des traitements psychiatriques est réduit à la prise de neuroleptiques, or ces médicaments ne guérissent pas, ils sont au mieux une béquille et au pire une camisole chimique, quand ce n’est pas la cause de décès. Le choix de la psychiatrie biologique, du tout médicament, est une aberration qui fait fi des raisons psycho-sociales qui peuvent perturber une vie, des ressources des personnes elles-mêmes, de l’importance de l’interaction sociale dans le mieux-être et des formes non-agressives de soins. Fermeture des lits et des centres de proximité La sectorisation s’est malheureusement révélée être un échec étant donné le sous-développement des structures de proximité. Nous nous rapprochons de la politique psychiatrique des Etats-Unis où les personnes sont hospitalisées 3 jours et mises dehors. Mais au bout de 3 jours si vous êtes mal et qu’il n’y a pas de structures annexes pour vous appuyer vous irez encore plus mal jusqu’au risque de passages à l’acte critiques. Non-respect structurel des droits des usagers D’une part, la loi du 5 juillet 2011 modifiée le 27 septembre 2013 a toujours du mal à rentrer dans les mœurs, elle encore très souvent détournée ou obstruée : absence de notification des droits, empêchement d’assister à l’audience du JLD. D’autre part, les patients hospitalisés connaissent dans les lieux des pressions et humiliations quotidiennes sur leurs droits, qui relèvent de pratiques coutumières et qui sont complètement banalisées. Elles sont très bien décrites par l’ex-infirmier Philippe Clément ainsi que par la chercheuse Pauline Rhenther. Création d’un monopole des représentants d’usagers Bien que vous nous ayez fait part du constat du manque d’associations et de représentants d’usagers dans le milieu psychiatrique, votre ministère a décidé de la création d’une association fédératrice et porte-voix pour l’essentiel des associations agréées nationalement toutes disciplines médicales confondues, qui deviendrait son interlocuteur privilégiée. France Assos Santé, avec à sa tête le chef d’entreprise Alain-Michel Ceretti, est le résultat d’une volonté politique de créer un monopole de représentations des usagers en santé qui écrase encore plus qu’elles ne le sont déjà les petites associations d’usagers. Dans l’intérêt de tous, il serait temps que les pouvoirs publics prennent conscience de l’échec de leur politique psychiatrique depuis les années 1990, et prennent des positions claires qui peuvent-être très simples, dans la perspective de créer un appel d’air. La logique de rationalisation ne fait qu’accroitre les problèmes et son pendant dans les recommandations de bonnes pratiques ne peut pas être satisfaisant. Puisqu’il est prévu que 25 % de la population sera tôt ou tard sujette à des troubles psychiques, c’est la conception et la politique d’un rétablissement du trouble psychique qui est à penser. Le raisonnement est simple : une personne chronicisée dans son mal être coûte cher et mobilise des acteurs. Faire en sorte que les prises en charge soient efficaces est dès lors une question prioritaire. Par ailleurs, il serait impératif de mettre en place une politique de dé-psychiatrisation et de dé-chronicisation. Je vous rappelle certaines des propositions du CRPA dans ce sens : Carte de soins L’offre de soins doit pouvoir être diversifiée afin qu’outre les médicaments un panel de soins puisse être proposé aux usagers de la psychiatrie publique. Sachant qu’un grand nombre de patients sont en situation de précarité sociale, et qu’ils se retrouvent exclus des bénéfices de soins et de thérapies qui ont cours dans le privé et qui ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale. Politique d’évitement de l’internement psychiatrique Dans les cas de crise, de nombreuses hospitalisations pourraient évitées en mettant en place un dispositif d’écoute de la personne. Plutôt que d’hospitaliser immédiatement, il s’agirait de donner la possibilité à la personne de se calmer et d’échanger sur ses difficultés en la prenant quelques heures à part dans un espace calme et apaisant. Tous les états de crise ne sont pas liés à des troubles psychiatriques, ils ont souvent pour cause des conflits ou des situations qui ne légitiment pas une psychiatrisation. Intransigeance sur la maltraitance et le non-respect des droits des usagers Les soignants qui y dérogent doivent pouvoir être sanctionnés. Pour l’heure aucun médecin responsable de la mort d’un patient pour cause de surmédication, défaut de surveillance ou autre, n’a pu être condamné. Des hôpitaux qui portent la responsabilité des actes psychiatriques ont été condamnés en juridiction administrative pour de tels fait, mais jamais au pénal ce qui est scandaleux. Ouverture de la représentation des usagers Outre France Assos Santé, les pouvoirs publics continuent d’avoir pour interlocuteurs privilégiés l’Unafam et la Fnapsy. Or l’Unafam, bien qu’elle occupe à ce jour la plupart des postes de représentants d’usagers, est statutairement une association des familles et de proches des usagers. La représentation des usagers ne peut plus décemment être tenue par les familles ! Quant à la Fnapsy, bien qu’elle ait été complètement discréditée, elle continue à être appelée comme relai crédible par les pouvoirs publics. Le CRPA, bien qu’agréé, s’est vu de son côté refuser toute participation aux CLSM et instances auxquels il s’est proposé, pour des motifs que nous contestons, et sans que votre ministère manifeste son soutien en vue d’une nécessaire ouverture du paysage de la représentation des usagers. Plutôt que de perdurer dans une situation coûteuse, inefficace et de plus en plus violente qui risque de vous mettre tout le monde à dos, je pense qu’il serait plus judicieux de prendre le risque de vous mettre certains acteurs du terrain psychiatrie – santé mentale à dos, en reconsidérant vos axes politiques et les messages que vous adressez aux acteurs du terrain dans leur ensemble.