Le monde de la santé selon Macron est un monde en ruine
Le président de la République a présenté, le 18 septembre, le plan Ma Santé 2022. Nous nous félicitons que les communicants du président aient convaincu notre arrogant président de ne pas disqualifier dans son propos une catégorie professionnelle, c’est nouveau et rare. Car nous n’oublions pas qu’il se permit, il y a peu, d’accabler de son mépris les fonctionnaires, les cheminots, les migrants, les retraités, les allocataires divers, les malades, tous prétendument jouisseurs d’avantages indus, de privilèges. Il continue cependant à accabler de son mépris les chômeurs que son monde laisse au bord de la route. Mais gageons que Macron poursuivra dès que possible cette stratégie du bouc émissaire, qui dresse les Français les uns contre les autres, encourage la haine, la violence et n’est décidément pas bonne pour la santé.
Cette fois, c’est « seulement » l’intelligence des hospitaliers qu’il insulta. Il se présenta à nous comme une sorte de Mac Gyver capable de bricoler sous les yeux ébahis du public le système de santé du pays. Ce fut juste avant…. l’annonce de la restriction de 3,8 milliards d’euros sur le budget de la santé, et l’annonce de la suppression de 30 000 postes hospitaliers, dans le cadre d’un budget où les capitalistes sont plus que jamais les premiers servis. Cela alors que la souffrance au travail se généralise dans les services hospitaliers, que 30 % des postes hospitaliers sont à pourvoir, et alors que les mouvements de soignants dans les hôpitaux psychiatriques se multiplient. Ce président mérite bien l’impopularité remarquable qu’il concentre sur sa personne.
Certes, la fin annoncée du « numerus clausus » actuel, c’est la fin d’une aberration enfin reconnue comme telle. C’est bien, mais cela ne suffira pas à repenser les études de médecine et à organiser leur refonte. Ensuite, une des principales annonces largement commentée est celle de Communautés professionnelles de territoire ((CPTS) pour « désengorger les urgences ». Annonce en fait fort floue lorsqu’on lit que la participation de médecins libéraux s’y fera sur le mode du volontariat. Il reste à avoir confiance dans la parole présidentielle pour obtenir quelques moyens matériels pour concrétiser ce vœu présidentiel.
Passons maintenant au cœur de notre opposition au plan de ce président.
Des hôpitaux de proximité sont promus : les hôpitaux locaux relookés se concentreront sur quelques activités (la médecine polyvalente, gériatrique). Il semble s’agir principalement d’établissements à but lucratif, pratiquement sans personnel salarié (en dehors de l’encadrement, de l’entretien). Les personnels soignants seraient principalement des prestataires exerçant en libéral (médecins, infirmières). Ce n’est pas une réponse à la désertification médicale galopante alors que les hôpitaux et maternités de proximité existants continuent de fermer et que le secteur psychiatrique qui fut un modèle, plus ou moins réussi, de médecine décentralisée et en lien avec les acteurs locaux achève de mourir.
La création d’un statut unique de praticien hospitalier (PH), associée à la suppression du concours PH, « pour faciliter l’entrée dans la carrière, diversifier les parcours professionnels et faciliter l’exercice mixte » est censée renforcer les services. Or, la disparition de ce concours de PH est un des aspects du démantèlement du service public. Le concours et le statut de praticien hospitalier sont un socle du service public hospitalier, avec des équipes de soignants travaillant à temps plein et sous statut. Briser cela c’est briser l’autonomie des équipes de soin, brider leur créativité au service du public ; c’est parachever l’œuvre destructrice que nous vivons chaque jour.
Nous mettons cette décision en série avec le maintien réaffirmée des GHT. Cette fois c’est dit : les cliniques privées vont y participer. Cette porosité entre le service public et les établissements privés à but lucratif est un autre volet de la destruction annoncée et voulue du service public de santé. Nous prévoyons que cela favorisera la fuite des médecins vers le privé, les rivalités entre responsables, la compétition pour les primes. In fine cela favorisera les ressources libérales et les revenus du capital.
Quant à la « qualité des soins », si elle est envisagée, son financement va conduire inéluctablement à soigner des indicateurs, comme le montrent toutes les études internationales. Sa construction sera une nouvelle usine à gaz bureaucratique qui alourdira le travail des soignants, alors que nous avons plutôt besoin de simplification administrative ! Or, de simplification, Macron en parle beaucoup, mais il organise l’inverse.
Il nous propose en fait de passer des dysfonctionnements performants de la T2a à ceux de la qualité et de parcours standardisés.
Le renforcement de la participation des médecins au pilotage stratégique des établissements ainsi que la réaffirmation de la place des services sont apparemment de bonnes nouvelles, mais le terme de « management des ressources hospitalières » suit cette annonce : ce seront les directions armées de leur management catastrophique qui seront à la manœuvre et sont invitées à s’associer quelques médecins aimant manager à leurs côtés. Sous la tutelle réaffirmée des ARS et du ministère.
Concernant la psychiatrie publique, avec une habileté sans égale, Madame Buzyn en organise la disparition en la réduisant à ses dimensions éducatives, sécuritaires ou de traitement de symptômes (communiqué Buzyn, feuille de déroute de la psychiatrie) tout en laissant pourrir toutes les situations locales, au Rouvray, à Amiens, à Paris, à Niort à Saint Etienne, etc. (communiqué Une rentrée animée pour sauver les institutions psychiatriques).
Responsable mais pas coupable : ce sont les ARS qui font les basses besognes locales.
La psychiatrie était le parent pauvre de la santé ; la solution à ce problème trouvée par Macron-Buzyn-Darnanin est de liquider la psychiatrie !
Macron définit les grandes lignes de la stratégie et Darmanin donne les moyens budgétaires de la liquidation. C’est en même temps que Macron, le 18 septembre, promet de sauver l’hôpital et de programmer la disparition de l’hôpital public.
Ces annonces n’apportent pas de solution à tous les problèmes explosifs de la santé en France, elles participent au contraire du problème par la déstructuration annoncée du service public de santé au profit des capitalistes du secteur. Qui appartiennent au même milieu social de ce président.
Face à cela, l’USP renouvelle son appel à soutenir toute lutte ou mouvement non violent et non fascisant permettant de mettre fin à cette politique.
Pascal Boissel, président
Pierre Paresys, vice-président