Laissons à Agnès Buzyn l’austérité hivernale, et mettons le cap vers un Printemps de la psychiatrie !
Agnès Buzyn a pour la deuxième fois présenté ses orientations lors du Congrès de l’Encéphale, un des temples des neurosciences et des laboratoires pharmaceutiques.
Les mesures qu’elle y a annoncées visent à réduire la psychiatrie à ses dimensions éducatives, sécuritaires ou de traitement de symptômes (communiqué Buzyn, feuille de déroute de la psychiatrie). Le budget annoncé, 50 millions, c’est une paille (un poste par secteur et inter-secteur). La destruction en cours de la psychiatrie de secteur reste dans le logiciel du ministère.
Au contraire de la ministre, avec les autres signataires du Manifeste « Printemps de la psychiatrie », nous affirmons que la psyché humaine est tellement complexe qu’elle n’obéit à aucune causalité, simple et univoque, qu’elle se moque des réductions idéologiques. Nous nous opposons donc à toute politique d’homogénéisation des pratiques. La diversité des pratiques et des modèles doit être respectée et la formation des soignants, médecins ou non, doit la garantir.
Nous affirmons que la politique de secteur (quand elle existe), représente un exemple qui, selon nous, devrait être suivi par les autres spécialités, notamment pour ce qui concerne la continuité des soins, l’articulation temps plein temps partiel, l’ambulatoire, les pratiques en réseau, la liaison entre divers intervenants. Cela implique comme condition indispensable que les agents, médicaux ou autres, ne sont pas interchangeables. Il s’agit là d’une nécessité impérieuse pour pouvoir mettre en œuvre un dispositif permettant de proposer des soins à toute la population sans discrimination tout en apportant une réponse singulière et évolutive dans le temps.
La manifestation nationale du 22 janvier 2019 qui a réuni à Paris des centaines de soignants, familles et patients, a fait entendre des voix que Madame Buzyn continue à ignorer, à mépriser.
La politique que nous voulons, que nous exigeons, avec ces manifestants et avec bien d’autres, est celle qui laisse la possibilité à la créativité, à l’artisanat au quotidien de fleurir. Il faut comme condition à cette possibilité en finir avec l’instrumentalisation sécuritaire de notre discipline. Il faut en finir avec la modélisation et de la standardisation à l’œuvre, avec la dictature comptable (communiqué Non à la dictature comptable !).
Les migacs, les ordonnances d’Etat, les budgets fléchés (outre l’appauvrissement des pratiques) ont un coût : ils sont source de gaspillages, ils cassent des dispositifs pertinents et ainsi génèrent un surcoût. Cette logique d’un financement sur la base d’indicateurs quels qu’ils soient – qualité, parcours – présente toujours les mêmes travers (communiqué Le monde de la santé selon Macron est un monde en ruine). Elle favorise la discrimination entre les patients, ceux qui sont adaptables au dispositif et les autres. Elle favorise le privé lucratif au détriment du public et de ses impératifs d’accès pour tous.
Il faut un mode de financement stable, lisible sur la durée permettant aux équipes d’adapter le dispositif en fonction des besoins et des moyens réels et permettant l’accès à des soins psychiques de qualité pour toutes et tous sur l’ensemble du territoire (Contribution de l’USP pour la table ronde du 17 janvier 2019)
L’USP renouvelle son appel à soutenir toute lutte ou mouvement non violent et non fascisant permettant de mettre fin à cette politique (communiqué Redonnez-nous un(e) ministre de la Santé !). C’était pourquoi nous étions dans la rue le 22 janvier, c’est pourquoi nous nous préparons à y retourner. …
L’« urgence psychiatrique » c’est d’inventer partout mille printemps de la psychiatrie !
Pascal Boissel, président
Pierre Paresys et Philippe Gasser, vice-présidents