Communiqué USP, CGT, SUD et Printemps de la psychiatrie : Non à la T2A en psychiatrie
Emmanuel Macron le 12 mars : « Il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché ».
Le constat d’une psychiatrie sous-dotée est fait par tous ses acteurs depuis plusieurs années, ce fut mis en lumière par les mouvements de grève de 2018 et 2019. Et potentialisé par la crise actuelle.
Les rapports et prises de position diverses depuis l’automne 2019 puis le PLFSS ont d’ores et déjà fixé les grands axes de cette réforme qui prévoit, outre une dotation globale sur une base populationnelle, des dotations complémentaires intégrant le type d’activité des établissements notamment au travers de leur file active, et c’est là que le bât blesse. L’équité entre établissements d’une même région ou d’un même département ne sera pas assurée, une partie des financements découlant des résultats atteints (activité, qualité, codage, recherche, nouvelles activités).
Didier Guidoni, membre de la Task Force du ministère chargée de cette réforme, l’a clairement dit. Il s’agit de « transformer l’offre par le financement, d’améliorer le codage, lequel permettra de mieux mesurer l’activité, pour réfléchir aux futurs modes de financement dans 10 ans ».
« L’idée est d’avoir un objectif national de dépenses pour la psychiatrie comme il en existe en MCO et SSR » selon lui. Tout est dit, quand on sait à quel point ces disciplines sont minées par la T2A.
Il est par ailleurs prévu de trouver un modèle de financement commun à tous les opérateurs publics et privés, « la tarification actuelle des cliniques privées les empêchant de prendre le virage ambulatoire ». Le rapport Wonner sur l’organisation de la santé mentale en France, paru en septembre 2019, prônait déjà le virage ambulatoire et la fin du secteur jugé « obsolète » par elle. Tout est fait pour que le privé investisse dans l’ambulatoire, nouvelle manne financière pour les temps à venir.
Nous, syndicats et collectif du Printemps de la psychiatrie représentant des usagers, des familles, des citoyens, des professionnels syndiqués et non syndiqués de la psychiatrie, refusons toute orientation qui irait vers une tarification à l’activité en psychiatrie. Nous affirmons la nécessité d’une gestion des budgets et des moyens en fonction des besoins pour la psychiatrie décidée démocratiquement en autogestion par les professionnels et les usager·e·s.
Nous exigeons l’arrêt des suppressions arbitraire et comptable de lits, de services, et nous opposons à la mise en place d’une tarification dégressive, nouvelle mouture masquée de la réduction des lits.
Nous nous opposons à l’instance managériale qu’est la Haute autorité de santé (HAS) qui pervertit la notion de qualité en l’assujettissant à ses orientations budgétaires. Et de fait tend à réduire la psychiatrie a une succession de protocoles stériles.
Nous exigeons la sanctuarisation, et la revalorisation d’au moins 5 % pour les années 2020/21 du budget de la psychiatrie.
Nous refusons toute référence technocratique à la quantité de travail. Elle signifierait de facto une accélération des cadences de travail, une diminution des temps de consultations, une suppression de tous les temps informels ainsi que les temps formels de réunions tant cliniques qu’institutionnelles absolument nécessaires à la réflexion des équipes soignantes, une disparition de la recherche clinique. Elle entrainerait une mise à l’index des personnes souffrant les pathologies les plus lourdes pour lesquelles les prises en charge sont nécessairement longues.
Ces logiques évacuent le coût immense pour la société de la dégradation des soins en psychiatrie ! Il faut au contraire rattraper les sous-financements abyssaux et retards d’investissements, accumulés par les établissements assurant le service public dans le champ de la psychiatrie et de la pédopsychiatrie.