Communiqué de presse du Printemps de la Psychiatrie du 17 septembre 2021
Aux Assises de la santé mentale et de la psychiatrie les 27 et 28 septembre 2021, décidées par le
Président Macron et structurées par les tenants de Fondamental, seules des personnalités en vue de la psychiatrie avec l’Unafam et la Fnapsy – loin de représenter toutes les sensibilités – sont invitées.
Le Printemps de la psychiatrie en prend acte et appelle à un rassemblement-tintamarre, devant le ministère de la Santé, le 28 septembre à 14 heures. Il appellera à une conférence de presse le 27 septembre à 8h30, au 43, rue Richer (Le Beaucé), Paris 9e.
C’est la « santé mentale » qui est mise au cœur de ces Assises, sans que soient prises en compte les inquiétudes majeures de la Commission Nationale de la Psychiatrie concernant l’état actuel de la psychiatrie. Pour nous, le modèle de la psychiatrie de secteur permettant l’accueil inconditionnel de tous et toutes, basé sur des principes de proximité et de continuité des soins, doit absolument être remis en perspective*.
La psychiatrie est à genoux. Ses failles et ses insuffisances actuelles sont dues à trente années
d’étranglement budgétaire poussant au désengagement d’une partie de la profession.
Alors que les besoins et les demandes de la population ont nettement augmenté, les effectifs
soignants ont diminué. Les restrictions budgétaires aboutissent à une dégradation considérable de
l’autonomie et de la spécificité des structures de soin. Cette triste évolution a été facilitée par la loi
HPST (Hôpital, Patients, Santé, Territoire) instaurant une gouvernance d’entreprise, un despotisme
économique et comptable à l’ère des COPIL (comités de pilotage) et des « groupes de travail » au
contenu formaté et dont les participants ne sont pas mandatés.
La réforme du financement pour la psychiatrie introduit, dès janvier prochain, un financement à
l’activité, qui valorise les prises en charge courtes, tant en ambulatoire qu’en hospitalisation, et les
projets dits innovants au détriment du modèle de la psychiatrie de secteur. Cette réforme parachève
la destruction de l’hôpital public, aujourd’hui menacé d’écroulement par la pandémie.
Alors que les soignants ont besoin de quiétude pour inventer du lien thérapeutique, ils sont étranglés
par leur charge de travail. Le technico-administratif a envahi leurs pratiques au détriment de la
clinique et de la réflexion institutionnelle. Les usagers sont trop souvent délaissés et maltraités par
des conditions d’accueil indignes. L’isolement, voire la contention, sont les seules options,
sécuritaires, pour des soignants usés, dans des services manquant de moyens humains, de formation,
quand elles ne deviennent pas les réponses au moindre écart comportemental, ou pire, quand la
contention se voit rationalisée comme un soin.
Les soins sans consentement, dans cette psychiatrie sinistrée, sont devenus la règle, faute de trouver
le temps nécessaire à l’accueil et à la prévention. A cela s’ajoute une répression accrue des équipes
et des professionnels qui dénoncent cette réalité et sont engagés pour le respect des Droits des
patients. L’ambiance au quotidien est devenue irrespirable.
La néopsychiatrie mise en avant actuellement n’est qu’une régression vers une forme étriquée
des neurosciences. Elle réduit la souffrance psychique à un travers du neuro-développement, une
erreur des circuits du comportement, à un défaut génétique, ou encore à une anomalie biologique.
Elle ignore l’apport des sciences humaines aux savoirs sur la dynamique de la vie psychique. Elle
marie le renforcement des dispositifs sécuritaires – dont la réforme de l’irresponsabilité pénale est le
dernier avatar – avec les discours de façade sur l’inclusion et la déstigmatisation.
Les psychologues sont visés par une mise aux ordres, tant par l’arrêté du 10 mars 2021 que par le
projet d’un Ordre des psychologues. Nous refusons que leurs pratiques soient dictées par des
théories en vogue et soumises à une médecine elle-même instrumentalisée. Les psychothérapies
doivent être accessibles dans leur diversité, chacun pouvant recourir aux soins qui lui conviennent.
Plutôt que de rendre les consultations psychologiques accessibles à tous, la notion de « santé
mentale » sert d’alibi pour sous-traiter les difficultés psychiques les moins lourdes à des réseaux
spécialisés de psychologues libéraux, sous-payés et sur prescription médicale.
L’organisation en filières de soins, ségréguant les individus selon leurs pathologies, accompagnant
les restructurations des hôpitaux, ainsi que la multiplication d’équipes intersectorielles prestataires
de services, morcellent les soins et nient les fondements de la psychiatrie de secteur et ses liens avec
le médico-social.
En outre, la pénurie de psychiatres et de pédopsychiatres, comme la répartition des internes très
défavorable aux Centres Hospitaliers Spécialisés, témoigne aussi de cette volonté de réduction par
asphyxie du service public de psychiatrie.
La bascule des soins du public vers le privé doit immédiatement cesser. Les cliniques privées ont
suffisamment profité de l’ouverture de marchés faramineux autorisée par les gouvernants depuis des
années. Des instituts de recherche privés, diverses « Plateformes » et des Start-up viennent
maintenant coloniser le coeur de l’organisation de la psychiatrie publique. C’est intolérable.
A l’heure où les changements de gouvernance sont mis en exergue, notamment après le Ségur de la
santé, les usagers et les professionnels du soin doivent pouvoir s’exprimer sur les soins qu’ils
souhaitent, sur les pratiques professionnelles…
Pour cette raison, le Printemps de la psychiatrie prépare les Assises citoyennes du soin psychique
les 11 et 12 mars 2022, autour des pratiques de soins que veulent les usagers, les familles et les
professionnels de la psychiatrie et du médico-social, et y invite toutes les parties intéressées.
La psychiatrie a besoin de travailler dans la liberté et la pluralité des approches
thérapeutiques. Elle exige le respect de la dignité dans les soins et des droits des patients.
Pendant la mascarade des assises présidentielles, le Printemps de la psychiatrie appelle à un
rassemblement devant le ministère de la santé, le mardi 28 septembre 2021 à 14h.
*Fondation de lobbying soutenue par des mécènes et partenaires privés et/ou associatifs, et par l’argent public. cf.
htps://www.fondaton-fondamental.org/nous-connaitre/nos-partenaires
** Le Collectif Inter-Hôpitaux (CIH) partage cette exigence dans son récent communiqué.