Depuis des années, nous voyons notre charge de travail augmenter autant que la qualité de ce travail ne cesse de se dégrader. Beaucoup sont lassés, perdent goût à l’exercice de cet art qu’est la médecine, et plus encore la psychiatrie, n’ont plus la disponibilité psychique pour penser la complexité des situations de leurs patients. Beaucoup enchaînent les consultations, les réunions. Beaucoup courent d’une structure à une autre, d’un CMP à un autre, balayant des territoires immenses. Beaucoup font face à des équipes fatiguées, blasées, démotivées. Le repli sur soi a déjà gagné de nombreux professionnels, qui ne pensent qu’à se sauver eux-mêmes face au burn-out. Qui pourrait les blâmer ? Certains, de plus en plus nombreux, finissent par quitter l’hôpital public au profit de l’exercice privé, en clinique ou en cabinet. Quelques-uns poussent le cynisme jusqu’à prendre une disponibilité pour faire de l’intérim, surpayé et sans responsabilité institutionnelle.
Il est grand temps de cesser d’avaler des couleuvres. La loi HPST a fait des médecins des managers sous l’autorité du patron, le directeur. A l’issue du Ségur, la circulaire Claris sur la nouvelle gouvernance vient enfoncer le clou.
Les financements se valident par projets, sommés d’être innovants et toujours plus efficients, mettant en concurrence les pôles entre eux, les équipes entre elles, les médecins entre eux. La prochaine introduction d’une tarification à l’acte va venir renforcer cette logique entrepreneuriale productiviste.
Certains ne veulent pas voir la réalité en face. Certains minimisent encore les difficultés qui démantèlent la psychiatrie publique. Certains se désolidarisent de leurs collègues, des fois qu’ils se verraient prendre leur place de courtisan par d’autres.
Il est grand temps de relever la tête, d’en finir avec les postures non suivies d’actes.
Personne n’est obligé d’accepter l’inacceptable.
La grève et la manifestation du 18 novembre seront une nouvelle étape pour dire ce que nous voulons, pour qu’une psychiatrie à visage humain continue d’exister !
Delphine Glachant, présidente de l’USP et le Conseil national