« Réduire les dépenses, c’est renoncer à l’argent magique, à l’illusion du tout gratuit. » Michel Barnier, discours de politique générale, 1er octobre 2024.
Rien d’étonnant à ce que Monsieur Barnier, Premier ministre, défende le contraire dans son discours de politique générale et dans les annonces qui ont suivi concernant le PLF et le PLFSS .
Le produit du travail de la population ne lui appartient pas, il en ferait mauvais usage. Tout ce qui a été mis en place relevant de la solidarité, d’une meilleure répartition des richesses, de la réduction des écarts, de la pauvreté, de la précarité, tout est attaqué. Le fil conducteur est clair : les services publics et la Sécurité sociale doivent être sérieusement limités. Peu importe les économies et leur impact, il n’y a pas de petit profit. Peu importe même si elles n’en sont pas.
La dégradation volontaire de l’état de santé de la population par la casse des services publics de santé ne représente jamais une économie, notamment sur la durée, sauf à considérer la réduction de la durée de retraite par le raccourcissement de la vie ! De cet héritage-là pour les générations futures, on ne parle pas. Les mesures visant à retarder ou renoncer aux soins par l’augmentation des restes à charge se multiplient.
Dans ce contexte et dans la continuité du travail des prédécesseurs du Premier ministre, la cure de dégoût des services public pour les travailleurs et les usagers continue. Mieux les dégrader pour mieux les privatiser et permettre un juste profit est visiblement la règle, peu importe la violence générée.
Au contraire, l’USP propose, suivant ainsi les recommandations de Madame Darrieussecq, ministre de la Santé, le 11 octobre 2024 à Albi (APM), affirmant que « tout ne doit pas venir d’en haut » et disant être ouverte aux idées d’économie :
– La mise en place d’une Sécurité sociale pour tous à 100 % pour permettre des soins rapides et moins coûteux, sans report ni renoncement.
– La suppression des restes à charge et la réorientation de toute la bureaucratie organisant la « non prise en charge » ou les « droits » vers les soins.
– La suppression de la T2A (y compris sa version psychiatrique) qui, par ses exigences bureaucratiques et par la course à la rentabilité qu’elle induit, éloigne les praticiens médicaux et paramédicaux de l’intérêt porté au patient et à sa santé au profit de la quête de financement. Les moyens de la bureaucratie comptable doivent être réorientés vers le soin au même titre que le temps-patient volé par les exigences du codage et du séquençage des actes.
– La suppression du financement sur appels à projet ou innovation qui n’ont d’autre résultat en psychiatrie que d’appauvrir la psychiatrie de secteur et la démanteler. Seules les équipes des services sont à même de faire ces choix. Les équipes ont d’autres choses à faire et penser qu’être dans la course aux financements. L’hôpital n’est pas une entreprise !
Ces 4 mesures faciles à mettre en place permettraient rapidement d’améliorer la qualité des soins, la disponibilité des équipes, l’accueil, la qualité du travail et de favoriser un regain de sens au travail. L’attractivité serait retrouvée à moyens constants, mais plus encore avec un Ondam (tant qu’il existe encore) souhaité à 10 %.
La gouvernance doit dans ce cadre être modifiée avec abrogation de la loi HPST. Les décisions doivent revenir aux services, aux secteurs pour la psychiatrie. Les chefs de service doivent être élus par leurs pairs. Les associations ou fédérations de secteurs doivent pouvoir se constituer pour mieux répondre aux besoins de la population par exemple aux niveaux des urgences des établissements MCO (hôpital général) selon le principe de subsidiarité.
Les directions et les ARS ainsi « inversées » dans leur mission doivent soutenir le dispositif soignant et les équipes.
Pour la psychiatrie, il ne faut rien entreprendre sous forme d’orientations « magiques » centrales qui mettraient à mal ce qui reste du dispositif sectoriel actuellement en crise profonde. L’équipe pluriprofessionnelle constitue pour rappel la réponse aux besoins d’une population donnée sans discrimination d’âge, de diagnostic, de provenance ou de situation sociale. Pour éviter tous les travers précédemment évoqués, le financement doit être strictement populationnel avec une correction en fonction de la situation sociale et sanitaire de la population et de la densité des dispositifs de soins. Cette approche pourrait être étendue à la MCO. Elle a déjà donné quelques résultats aux urgences, même si cela reste insuffisant au regard de niveau de destruction atteint.
Pour la pédopsychiatrie, au-delà des effets d’annonce mettant en avant les illusions des méthodes neuroscientistes qui ne réduiront aucunement les délais d’attente des familles en souffrance, les structures, notamment ambulatoires, doivent être renforcées par des personnels formés et confortés dans la stabilité et la pérennité de leurs fonctions, permettant également un travail en réseau avec les partenaires sociaux de l’éducation nationale et de la justice.
Enfin pour la psychiatrie notamment, mais aussi pour la MCO, il faut mener une politique d’amélioration des conditions de vie de la population, limiter les écarts et la précarité qui ne sont pas bons pour la santé ni pour le budget national. Il faut mieux protéger les travailleurs : depuis la loi travail, la souffrance au travail s’exprime en effet plus que jamais dans les centres médico-psychologiques (CMP). Cette augmentation de file active génère elle-même de la souffrance sociale pour les professionnels des CMP et dégrade les conditions et la qualité des soins prodigués. Peut-on décemment soutenir des personnes en souffrance au travail quand on l’est soi-même aussi ?
La médecine de santé au travail est exsangue. Elle doit être renforcée et valorisée afin de remplir le rôle de prévention des risques psychosociaux qui lui est dévolue.
L’USP défend donc le développement des services publics comme filet de sécurité sociale et garantie d’une meilleurs répartition des richesses, y compris au niveau territorial.
L’USP appelle donc à rejoindre tous les mouvements, syndicats et collectifs défendant ces objectifs.
Elle appelle à participer aux manifestations du 29 octobre pour la défense du service public de santé.
Charles Olivier PONS, président
Delphine GLACHANT, vice-présidente
Pierre PARESYS, vice-président
Philippe GASSER, membre du conseil national